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Habitude : un art d'agir sans y penser et mieux même qu'en y pensant.
Alain
Le vertige qui nous prend sur les hauteurs est une maladie véritable, qui vient de ce que nous mimons la chute et les mouvements désespérés d'un homme qui tombe.
On prouve tout ce qu'on veut, la vraie difficulté est de savoir ce que l'on veut prouver.
Si l'esprit est libre, et si Dieu est esprit, il s'offre une grâce et un secours, qui n'est pas autre chose que la liberté même.
Tous les vices ressemblent à la guerre, toujours menaçante, toujours évitable.
C'est un grand art quelquefois de vouloir ce que l'on est assuré de désirer.
La Prose va sans Dieu.
Le langage absolu se retrouve en tous les arts, qui, en ce sens, sont comme des énigmes, signifiant impérieusement et beaucoup sans qu'on puisse dire quoi.
Le pessimisme est d'humeur ; l'optimisme est de volonté. Tout homme qui se laisse aller est triste...
Quelle chose merveilleuse serait la société des hommes, si chacun mettait de son bois au feu, au lieu de pleurnicher sur des cendres !
Dès qu'on change ses pensées d'après l'événement, l'intelligence n'est plus qu'une fille.
Le travail impossible de séparer l'idée est un travail contre la nature. L'idée n'existe pas, ce qui existe c'est l'individu.
Il n'y a rien au monde que nous sentions aussi précisément et délicatement que le courage et son contraire ; et peut-être, en toutes les nuances du sentiment, ne sentons-nous jamais que cela.
L'amour n'est pas naturel ; et le désir lui-même ne l'est pas longtemps. Mais les sentiments vrais sont des oeuvres.
Les morts ne sont pas morts, c'est assez clair puisque nous vivons.
Dans la religion, tout est vrai, excepté le sermon ; tout est bon, excepté le prêtre.
C'est peu de prendre les êtres comme ils sont, et il faut toujours en venir là ; mais les vouloir comme ils sont, voilà l'amour vrai.
Espérer, c'est être heureux.
Le plus vulgaire des hommes est un grand artiste dès qu'il mime ses malheurs.
Cet ennui du paresseux, qui attend toujours que le plaisir lui vienne comme par magie.
L'erreur est facile à tous ; plus facile peut-être à celui qui croit savoir beaucoup.
... dans la conversation ainsi que dans la danse, chacun est le miroir de l'autre.
Un travail réglé et des victoires après des victoires, voilà sans doute la formule du bonheur.
Désordre dans le corps, erreur dans l'esprit, l'un nourrissant l'autre, voilà le réel de l'imagination.
Toutes les belles choses sont difficiles, comme dit le proverbe ; et celui-là ne saura jamais le violon, qui n'a su que s'y amuser.
Nul au monde n'a puissance sur le jugement intérieur ; si l'on peut te forcer à dire en plein jour qu'il fait nuit, nulle puissance ne peut te forcer à le penser.
L'intelligence, c'est ce qui, dans un homme, reste toujours jeune.
Il n'y a point d'ivresse égale à celle d'un homme qui a gagné un million et qui se prépare à le perdre. Celui qui arrivera à cette ataraxie en mouvement peut se vanter d'être au-dessus du sort.
Nos fautes périssent avant nous. N'en faisons pas des momies.
Gardez-vous des gens d'esprit ; ils feront tenir en trois lignes l'avenir de vos pensées.
La République de Platon est le livre des livres.
Les proverbes ne sont point d'entendement, mais de raison. Ils ne concernent jamais la nature des choses, mais ils visent à régler la nature humaine, et vont toujours à contre-pente, contre les glissements qui nous sont naturels.
Que les citoyens donnent plus volontiers leur vie que leur argent, voilà un paradoxe assez fort.
Chose remarquable et trop peu remarquée, ce n'est point la pensée qui nous délivre des passions, mais c'est plutôt l'action qui nous délivre.
L'histoire est composée de ce que les hommes font contre leur propre génie.
On dit bien des choses qu'on ne pense nullement, et chacun commence par là.
Savoir, et ne point faire usage de ce que l'on sait, c'est pire qu'ignorer.
Le propre de la poésie est que les mots éclairent selon leur place.
Il faut qu'une vérité soit révélée ; non pas une vérité neuve, mais au contraire vieille comme les rues, et cent fois prouvée.
On ne peut lire si on ne connaît les lettres, seulement les lettres sont effacées par le sens.
Les passions sont ainsi faites, peut-être, qu'elles périssent dès qu'elles n'ont plus à attendre.
Ce sont les passions et non les intérêts qui mènent le monde.
Je rêve que j'entends crier au feu ; je me réveille et j'entends que l'on crie au feu.
Un petit garçon demandait : "Pourquoi le couteau coupe-t-il la table, et pourquoi mon doigt ne coupe-t-il pas la table ?" On peut hausser les épaules, et dire qu'il y a une manie d'interroger, chez les enfants.
Etre cultivé c'est, en chaque ordre, remonter à la source et boire dans le creux de sa main, non point dans une coupe empruntée.
Penser sur des maximes c'est se reconnaître et reprendre le gouvernement de soi.
Les maximes générales sont surtout bonnes contre les peines et les erreurs du voisin. Mais contre une fureur d'amour trompé ou d'ambition, ou d'envie, que pourrait une maxime ? Autant vaudrait, contre la fièvre, lire l'ordonnance du médecin.
La pensée est une espèce de jeu qui n'est pas toujours très sain.
Comme la fraise à le goût de fraise, ainsi la vie a le goût de bonheur.
Je sus toujours mieux louer que blâmer.