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Je comprends alors pourquoi les doctrines qui m'expliquent tout m'affaiblissent en même temps. Elles me déchargent du poids de ma propre vie et il faut bien pourtant que je le porte seul.
Albert Camus
Le naturel n'est pas une vertu qu'on a : elle s'acquiert.
Vivre, bien sûr, c'est un peu le contraire d'exprimer. Si j'en crois les grands maîtres toscans, c'est témoigner trois fois, dans le silence, la flamme et l'immobilité.
Vivre, c'est faire vivre l'absurde. Le faire vivre, c'est avant tout le regarder. L'absurde ne meurt que lorsqu'on s'en détourne.
Et je comprenais cet homme qui, étant entré dans les ordres, défroqua parce que sa cellule, au lieu d'ouvrir, comme il s'y attendait, sur un vaste paysage, donnait sur un mur.
On ne découvre pas l'absurde sans être tenté d'écrire quelque manuel de bonheur.
Il n'y a rien de commun en effet entre un maître et un esclave, on ne peut parler et communiquer avec un être asservi.
La justice, c'est de juger les hommes sur eux-mêmes et non sur leur nom ou leurs idées.
Tu ne vois pas que le monde il est jaloux du bonheur que je te donne. Tu connaîtras plus tard le bonheur que tu avais.
Ni dans le coeur des individus ni dans les moeurs de la société, il n'y aura de paix durable tant que la mort ne sera pas mise hors la loi.
Il était naturel que le vieux Castel mît toute sa confiance et son énergie à fabriquer des sérums sur place, avec du matériel de fortune.
Un vrai chef-d'oeuvre ne dit pas tout.
Il y a tellement d'espoir têtu dans le coeur humain.
Vous ne vivrez jamais si vous recherchez le sens de la vie.
Les foyers d'infection sont en extension croissante. A l'allure où la maladie se répand, si elle n'est pas stoppée, elle risque de tuer la moitié de la ville avant deux mois.
Du moment qu'on meurt, comment et quand, cela n'importe pas, c'était évident.
Il n'y a pas si longtemps, c'étaient les mauvaises actions qui demandaient à être justifiées, aujourd'hui ce sont les bonnes.
Pour Chestov, la raison est vaine, mais il y a quelque chose au-delà de la raison. Pour un esprit absurde, la raison est vaine et il n'y a rien au-delà de la raison.
Nous sommes lucides. Nous avons remplacé le dialogue par le communiqué.
La modestie m'aidait à briller, l'humilité à vaincre et la vertu à opprimer.
Les doutes, c'est ce que nous avons de plus intime. Ne jamais parler de ses doutes - quels qu'ils soient.
Il ne faut pas être plus pressé que Dieu et tout ce qui prétend accélérer l'ordre immuable, qu'il a établi une fois pour toutes, conduit à l'hérésie.
Ni le réel n'est entièrement rationnel ni le rationnel tout à fait réel.
Ma position personnelle, pour autant qu'elle puisse être défendue, est d'estimer que si les hommes ne sont pas innocents, ils ne sont coupables que d'ignorance.
Si près de la mort, maman devait s'y sentir libérée et prête à tout revivre.
Contre l'injustice éternelle, l'homme doit faire valoir la justice et, pour protester contre l'univers du chagrin, il doit créer le bonheur.
Tout est bien, tout est permis et rien n'est détestable. Ce sont des jugements absurdes.
Beaucoup de gens réduits à l'inaction par la fermeture des magasins ou de certains bureaux emplissaient les rues et les cafés. Pour le moment, ils n'étaient pas encore en chômage, mais en congé.
L'art est une exigence d'impossible mise en forme.
Nous finissons toujours par avoir le visage de nos vérités.
Autrefois, ma maison était pleine de livres à moitié lus. C'est aussi dégoûtant que ces gens qui écornent un foie gras et font jeter le reste.
Le révolutionnaire est en même temps révolté ou alors il n'est plus révolutionnaire, mais policier et fonctionnaire.
L'amitié est une vertu.
Il n'y a qu'une façon de s'égaler aux dieux : il suffit d'être aussi cruel qu'eux.
Si le monde était clair, l'art n'existerait pas.
La vérité jaillira de l'apparente injustice.
Il y a toujours une certaine heure du jour et de la nuit où le courage d'un homme est au plus bas, et c'était cette heure-là seulement qu'il redoutait.
On se fait toujours des idées exagérées de ce qu'on ne connaît pas.
Le monde ne dit jamais qu'une chose, et il intéresse, puis il lasse. Mais un temps vient toujours où il conquiert à force de répéter et touche le prix de sa persévérance.
Le bonheur lui aussi est une longue patience. Et dans presque tous les cas, nous usons notre vie à gagner de l'argent, quand il faudrait, par l'argent, gagner son temps.
La lutte pour atteindre le sommet suffit à remplir le coeur de l'homme.
Pour un homme sans oeillères, il n'est pas de plus beau spectacle que celui de l'intelligence aux prises avec une réalité qui le dépasse.
Tout détruire, c'est se vouer à construire sans fondations ; il faut ensuite tenir les murs debout, à bout de bras.
La consolation de ce monde c'est qu'il n'y a pas de souffrances continues. Une douleur disparaît et une joie renaît. Toutes s'équilibrent. Ce monde est compensé.
La fin justifie les moyens. Mais qu'est-ce qui justifiera la fin ?
Il n'y a que l'amour qui nous rende à nous-mêmes.
Cette infirmité, après tout, était confortable. Conjuguée à ma faculté d'oubli, elle favorisait ma liberté.
Oui, l'homme est sa propre fin. Et il est sa seule fin. S'il veut être quelque chose, c'est dans cette vie.
Supprimer la morale rabâchée de la justice abstraite, rester près des êtres et des choses, reconnaître la nécessité des ennemis, aimer qu'ils soient.
Je n'ai jamais aimé être surpris. Quand il m'arrive quelque chose, je préfère être là.