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Quand c'est dur d'être femme, ça devient dur aussi d'être homme !
Atiq Rahimi
L'homme ne rit pas, cependant il a l'air de quelqu'un qui réfrène son rire. Cela lui donne une mine étrange, celle d'un homme qui, de l'intérieur, se moque de celui qui le regarde.
Et moi, Je devais prouver mon existence contre tout, en marge de tout. Ni monarchiste, ni communiste, ni féministe, ni mystique… Sans ordre aucun ! Je n'étais rien d'autre qu'un anarchiste. Mais sans le savoir. C'est aujourd'hui que je m'en rends compte. Jeune, j'étais déjà ailleurs. Sans patrie, sans terre. En exil, dans l'écriture
L'exil ne s'écrit pas. Il se vit. Alors j'ai pris le calame, ce fin roseau taillé en pointe dont je me servais enfant, et je me suis mis à tracer des lettres calligraphiées, implorant les mots de ma langue maternelle. Pour les sublimer, les vénérer.
Tu me connais... mes souvenirs m'attaquent toujours là où je ne les attends pas. Ou quand je ne les attends plus. Quoi que je fasse, ils m'assaillent. Les bons ou les mauvais. Ça crée des moments risibles.
Il ne faut jamais compter sur celui qui connaît le plaisir des armes
Qui étais-tu vraiment ? Personne ne savait. Pour nous tous, tu n'étais qu'un nom : le Héros ! Et, comme tous les héros, absent !
Tu sais bien, mon ami, dans ce pays, si tu te demandes pourquoi, il faut commencer par faire parler les morts dans leurs tombes.
Le soleil se couche. Les armes se réveillent. Ce soir encore on détruit. Ce soir encore on tue. Le matin. Il pleut. Il pleut sur la ville et ses ruines.
Dans mon pays, on a peur de la nudité, comme on a peur de la liberté. Parce que l'une exige l'autre. Et les deux, comme Eve, ne savent rien cacher. Elles révèlent tout, jusqu'à l'absence des dieux.
Tu es incapable de décrire ton chagrin : il na pas encore pris forme. C'est encore trop tôt. Si seulement il pouvait se dissiper avant même de prendre forme, disparaitre...
Loin, quelque part dans la ville, l'explosion d'une bombe. Violente, elle détruit peu-être quelques maisons, quelques rêves.
J'ai une religion personnelle. Je suis bouddhiste parce que j'ai conscience de ma faiblesse, je suis chrétien parce que j'avoue ma faiblesse, je suis musulman parce que je combats ma faiblesse. Et je suis Charlie si Dieu est tout-puissant.
Oui, c'est le désir qui crée l'absence, nullement l'inverse !
En callimorphie, je ne sais achever un corps. Je l'inachève. Peu importe si ce verbe n'existe pas. Il faut l'inventer. C'est beau, et si réel.
Vous les hommes quand vous avez des armes vous oubliez vos femmes
Il y a trente ans, arrivé comme réfugié en France, j'ai demandé l'asile culturel et non pas politique. Culturel parce que je ne me reconnaissais plus ni dans l'idéologie communiste de mon frère, ni dans la foi musulmane de la résistance. J'étais toujours ailleurs. Las de la guerre. Hors du Verbe
Un sourire. Un sourire jaune et court qui remplace millet et un mots pour exprimer ses regrets.
Il faudrait pouvoir dormir comme un nouveau-né, sans images, sans souvenirs, sans rêves. Comme un nouveau-né, reprendre la vie au commencement.
Mon pays a sombré dans la terreur de la guerre, dans l'obscurantisme, et, là-bas, j'ai perdu les clefs de mes songes, de ma liberté, de mon identité... Aussi l'ai-je quitté en espérant retrouver mes clefs là où il y a de la lumière, de la liberté, de la dignité... tout en sachant que je ne les retrouverai jamais. Toute création en exil est la recherche permanente de ces clefs perdues.
L'invisible est l'expression poétique de ce qui est absent, et certainement pas inexistant. Absent parce qu'il est ailleurs, là où je ne suis pas, ou je n'y suis plus. Ou bien, il est à l'endroit où je ne sais explorer au tréfonds de moi-même.
Ceux qui ne savent pas faire l'amour font la guerre
Vous les hommes, vous jouissez, et nous les femmes, nous nous en réjouissons
Tu ne souffre même pas. … Même blessé, tu es épargné par la souffrance. … Et c'est à moi d'en pâtir ! c'est à moi d'en pleurer !
La callimorphie, c'est la danse du corps sur la musique des lettres.
Il y a tout juste quelques instants, tu avais le coeur gros. Tu étais prêt à parler à n'importe qui de n'importe quoi. Voilà enfin quelqu'un à qui tu peux livrer ton coeur, quelqu'un dont le regard est déjà un réconfort. Dis quelque chose !
En callimorphie, les lettres révèlent le corps et le corps, comme le désir, dénude les lettres. La callimorphie, c'est la danse du corps sur la musique des lettres.
Je n'ai jamais compris pourquoi chez vous, les hommes, la fierté était tant liée au sang.
Cette voix qui émerge de ma gorge, c'est la voix enfouie depuis des milliers d'années.
Du corps par le corps avec le corps depuis le corps et jusqu'au corps.
La pierre t'écoute, éponge tous tes mots, tes secrets, jusqu'à ce qu'un beau jour elle éclate. […] Et ce jour-là, tu es délivré de toutes tes souffrances, de toutes tes peines.
Mes souvenirs m'attaquent toujours là où je ne les attends pas. Ou quand je ne les attends plus.
Au-dehors, quelque part, pas très loin, quelqu'un tire une balle. Un autre, plus proche, riposte. Le premier tire une deuxième balle. L'autre ne répond plus.
Tu connais ce genre de peur qui ne t'éloigne pas de ton désir, au contraire, ça t'excite, ça te donne des ailes, même si ça peut te brûler.
Les temps sont durs. Les hommes ont perdu toute dignité. Le pouvoir est leur foi, au lieu que la foi soit leur pouvoir. Il n'y a plus d'homme digne de ce nom, il n'y a plus d'hommes valeureux.