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La vérité est tout ce qui s'écrit.
Camille Laurens
Le père est le seul visage d'homme qui soit donné à une femme ; le père est le seul homme qu'il lui soit jamais donné d'être.
Tout le monde n'est pas prêt à la vérité. Les gens s'en foutent de la vérité. Ce qui compte, c'est ce qu'ils croient. La vérité, ils écrivent par-dessus. Ils la font disparaître à force de fictions, de récits. Ils vivent de ça, de ce qu'ils racontent.
Enseignante. En saignant aussi, quelquefois.
J'aime bien cette idée qu'on est responsable de l'amour qu'on suscite, c'est-à-dire que d'une certaine manière, à défaut d'y répondre, on en répond.
Si on pouvait se nommer, si on savait se présenter dans l'évidence de son sexe, dans la certitude de son être, on n'écrirait pas, il n'y aurait pas d'histoire, pas de sujet, pas d'objet.
Le meurtre, chez l'homme, c'est tout près, c'est juste sous la peau, frémissant, c'est au bord des yeux comme le désir, à fleur de tête. Le meurtre, en un sens, n'est qu'une figure du désir : c'est l'envie de vous le faire passer.
Le souvenir, ce n'est jamais fini, il n'y a pas de commencement ni de fin.
La littérature est une machine à fabriquer des souvenirs et de la mort, une manufacture de testaments. Aucun roman n'a jamais fait de projet d'avenir.
Déranger pour donner à penser, assurer à l'art une fonction critique, le mettre au service de la vérité, fût-elle cruelle : telles sont les visées d'Edgar Degas, et son extrême modernité.
Le sexe est une folie quand, au lieu d'unir, il sépare, renvoyant l'homme au délire de sa solitude.
La vie m'échappe, elle me détruit, écrire n'est qu'une manière d'y survivre – la seule manière. Je ne vis pas pour écrire, j'écris pour survivre à la vie. Je me sauve. Se faire un roman, c'est se bâtir un asile.
La jalousie des femmes est incommensurable, surtout lorsqu'elles restent entre elles.
Les fous et les amoureux appartiennent à la même espèce, d'ailleurs on dit amoureux fou.
Mais c'est un autre secret qu'elle découvre : celui de la langue. La vérité est tout ce qui s'écrit. Sur la platine, Léo Ferré chante : Les armes et les mots, c'est pareil, ça tue pareil.
Lire, c'est regarder la mort sans la voir, sans y croire, les yeux béants, les yeux béats.
Vous savez ce que disait Victor Hugo : Quand je vous parle de moi, je vous parle de vous.
Certaines femmes comprennent cela. Que mourir est leur seul moyen de se faire aimer.
Que les mots suscitent des émotions violentes, des sentiments comme la tendresse et la pitié, c'est déjà beaucoup, mais qu'ils touchent ainsi le corps, le fond du ventre qu'ils nous amènent à sangloter, à rire, à désirer, il faut le vivre pour le croire.
Peut-on se montrer tel que l'on est vraiment, sans être nu ?
"Tout donner, et puis s'en aller", c'est facile à dire. Les donneurs de leçons courent les rues, les avis sont toujours gratis, car on ne donne rien si libéralement que ses conseils.
Pour vous autres, hommes, les défaites ne sont que des succès en moins. Dans cette partie si inégale, notre fortune est de ne pas perdre, et votre malheur de ne pas gagner.
L'anniversaire, c'est ce moment où l'année tourne, où se révèle un autre versant du temps - et quelquefois il verse comme un chariot.
Il y a des hommes passés maîtres dans l'art d'entendre les interrogations muettes.
Les hommes sont toujours plus enfoncés dans la mort. Quel crime ont-ils commis pour vouloir s'en délivrer dans l'oubli ?
Si la femme, dit le poète, est l'avenir de l'homme, il arrive parfois, loin des chansons, que l'enfant soit le passé de la femme.
Nous sommes tous, dans les fictions continues de nos vies, dans nos mensonges, dans nos accommodements avec la réalité, dans notre désir de possession, de domination, de maîtrise de l'autre, nous sommes tous des romanciers en puissance. Nous inventons tous notre vie.
C'est toujours une chose étrange, dans une fratrie, de voir le destin broder différemment sur le canevas des mêmes souffrances.