Images
Le cerveau est l'obstacle à la pensée scientifique. Il est un obstacle en ce sens qu'il est un coordonnateur de gestes et d'appétits. Il faut penser contre le cerveau.
Gaston Bachelard
Imaginer, c'est hausser le réel d'un ton.
Le poète est celui qui a le pouvoir de déclencher le réveil de l'émotion poétique dans l'âme du lecteur.
Les êtres cachés et fuyants oublient de fuir quand le poète les appelle par leur vrai nom.
La science est l'esthétique de l'intelligence.
Accéder à la science, c'est, spirituellement, rajeunir, c'est accepter une mutation brusque qui doit contredire un passé.
Toute nouvelle vérité naît malgré l'évidence.
Le romancier, qu'il le veuille ou non, nous révèle le fond de son être, encore qu'il se couvre littéralement de personnages. En vain, il se servira "d'une réalité" comme d'un écran. C'est lui qui projette cette réalité, c'est surtout lui qui l'enchaîne.
Le signe premier de la certitude scientifique, c'est qu'elle peut être revécue aussi bien dans son analyse que dans sa synthèse.
Une expérience scientifique est alors une expérience qui contredit l'expérience commune.
La végétation ne connaît pas de contradiction. Il vient des nuages pour contredire le soleil du solstice. Aucune tempête n'empêche l'arbre, à son heure, de devenir vert.
Le paon est éminemment terrestre. C'est un musée minéral.
Aux hommes les plus cultivés, il suffit parfois d'un commencement ou d'un prétexte de rationalisation pour accepter la "science" de la baguette magique.
Quand on cherche les conditions psychologiques des progrès de la science, on arrive bientôt à cette conviction que c'est en termes d'obstacles qu'il faut poser le problème de la connaissance scientifique.
Si l'on nous demandait le bienfait le plus précieux de la maison, nous dirions : la maison abrite la rêverie, la maison protège le rêveur, la maison nous permet de rêver en paix.
Un fantôme que l'on décrit avec complaisance est un fantôme qui cesse d'agir.
Avec les êtres vivants, il semble que la nature s'essaie à la facticité. La vie distille et filtre.
Celui qui trouve sans chercher est celui qui a longtemps cherché sans trouver.
Avoir su est souvent une excuse pour se désintéresser d'apprendre.
Un homme solitaire, dans la gloire d'être seul, croit parfois pouvoir dire ce qu'est la solitude. Mais à chacun sa solitude. Et le rêveur de solitude ne peut nous donner que quelques pages de cet album du clair-obscur des solitudes.
Comprendre est l'acte même du devenir de l'esprit.
Par l'imagination nous abandonnons le cours ordinaire des choses. Percevoir et imaginer sont aussi antithétiques que présence et absence. Imaginer c'est s'absenter, c'est s'élancer vers une vie nouvelle.
Le langage est aux postes de commande de l'imagination.
La conquête du superflu donne une excitation spirituelle plus grande que la conquête du nécessaire. L'homme est une création du désir, non pas une création du besoin.
Cette ouverture au monde dont se prévalent les philosophes, n'est-elle pas une ré-ouverture au monde prestigieux des premières contemplations ?
Dès l'époque secondaire, les mollusques construisaient leur coquille en suivant les leçons de la géométrie transcendante.
L'image ne peut être étudiée que par l'image, en rêvant les images telles qu'elles s'assemblent dans la rêverie.
Tout rêveur de flamme est un poète en puissance. Toute rêverie devant la flamme est une rêverie qui admire.
Le rêve chemine linéairement, oubliant son chemin en courant. La rêverie travaille en étoile. Elle revient à son centre pour lancer de nouveaux rayons.
On ne pourra bien dessiner le simple qu'après une étude approfondie du complexe.
Je veux savoir pour pouvoir savoir, jamais pour utiliser.
Le noir est le refuge de la couleur.
L'homme en tant qu'homme ne peut vivre horizontalement. Son repos, son sommeil est le plus souvent une chute.
Mieux vaudrait une ignorance complète qu'une connaissance privée de son principe fondamental.
L'homme veut voir. La curiosité dynamise l'esprit humain.
La mort est d'abord une image, et elle reste une image.
Une instruction qu'on reçoit sans la transmettre forme des esprits sans dynamisme, sans autocritique.
Le poème est une grappe d'images.
Tout se mange. Réciproquement, tout est mangé.
Dans la pensée scientifique, la médiation de l'objet par le sujet prend toujours la forme du projet.
La devise du mollusque serait alors : il faut vivre pour bâtir sa maison et non bâtir sa maison pour y vivre.
Ce qui limite une connaissance est souvent plus important, pour les progrès de la pensée, que ce qui étend vaguement la connaissance.
On ne peut retenir qu'en comprenant.
La philosophie peut être mauvaise alors même que les poèmes sont beaux.
La grandeur progresse dans le monde à mesure que l'intimité s'approfondit
C'est près de l'eau et de ses fleurs que j'ai mieux compris que la rêverie est un univers en émanation, un souffle odorant qui sort des choses par l'intermédiaire d'un rêveur.
L'abstraction est un devoir, le devoir scientifique, la possession enfin épurée de la pensée du monde !
L'imagination n'est rien d'autre que le sujet transporté dans les choses.
Le poème est essentiellement une aspiration à des images nouvelles. Il correspond au besoin essentiel de nouveauté qui caractérise le psychisme humain.
Nous souffrons par les rêves. Nous guérissons par les rêves.