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Lorsque les nécessités économiques sont contraires aux impulsions affectives et mystiques qui mènent les hommes, une révolution devient inévitable.
Gustave Le Bon
Un peuple ne sort de la barbarie que par l'acquisition d'une morale très stable. Dès qu'il l'a perdue, il retourne à la barbarie.
Reculer devant un danger a pour résultat certain de le grandir.
Démontrer qu'une chose est rationnelle ne prouve pas toujours qu'elle soit raisonnable.
Si les croyants pouvaient se préoccuper de la valeur rationnelle de leurs croyances, il n'y aurait bientôt plus de croyants.
Tout peuple qui se développe avec excès devient fatalement envahisseur et destructeur des peuples dont la fécondité est moindre.
Quand l'édifice d'une civilisation est vermoulu, ce sont toujours les foules qui en amènent l'écroulement. C'est alors qu'apparaît leur principal rôle, et que, pour un instant, la philosophie du nombre semble la seule philosophie de l'histoire.
Une des plus dangereuses habitudes des hommes politiques médiocres est de promettre ce qu'ils savent ne pouvoir tenir.
La connaissance vient par les livres. La croyance par les apôtres.
Il n'est d'éducation utile que celle cultivant les aptitudes spéciales de chaque être. On obtient alors tout ce que l'élève peut donner sans exiger un inutile travail.
Le jugement sans volonté est aussi inutile que la volonté sans jugement.
Les aristocraties ont pris des formes diverses : naissance, talent, fortune mais le monde ne s'en est jamais passé.
Qui connaît l'art d'impressionner l'imagination des foules connaît aussi l'art de les gouverner.
Les grands manieurs d'hommes furent toujours des créateurs de désirs.
Les civilisations se fondent sur un petit nombre d'idées tenues pour des certitudes et universellement respectées. Ce n'est pas leur valeur rationnelle mais leur rôle qu'il importe de connaître.
Les révolutions n'ont généralement pour résultat immédiat qu'un déplacement de servitude.
Les hommes se divisent en meneurs et en menés. L'immense majorité se compose de menés.
Un homme d'Etat sans prévoyance est un créateur de fatalités désastreuses.
L'être vraiment malheureux est celui à qui on persuade que son état est misérable. Ainsi procèdent les meneurs, pour faire les révolutions.
La guerre révèle à un peuple ses faiblesses, mais aussi ses vertus.
L'homme d'Etat capable de prévoir toutes, les répercussions, de ses actes serait comparable au joueur d'échecs lisant sur l'échiquier de son adversaire les possibilités invisibles résultant du déplacement des pièces visibles.
Les rêveurs n'ont aucun pouvoir créateur, mais ils possèdent parfois une puissance destructive considérable. Sous leur dissolvante action, les institutions péniblement édifiées par le temps se désagrègent avec une extrême rapidité.
L'homme des anciens âges avait une religion, un foyer, une famille. L'homme des temps modernes n'a plus ni religion ni foyer, et c'est à peine s'il lui reste une famille.
L'héroïsme peut sauver un peuple dans les circonstances difficiles, mais c'est l'accumulation journalière de petites vertus qui détermine sa grandeur.
Une armée dirigée par des chefs compétents manifeste des qualités de courage, de patience, de dévouement, que ne possède jamais au même degré chacun des hommes qui la constituent.
Entre hommes politiques de partis différents l'amitié est possible. Entre hommes d'un même parti la jalousie est généralement trop intense pour permettre l'amitié.
Une responsabilité morcelée devient vite de l'irresponsabilité.
Pour progresser, il ne suffit pas de vouloir agir, il faut d'abord savoir dans quel sens agir.
La vie des plus grands génies semble avoir pour la nature juste autant d'importance que celle d'une colonie de microbes ou d'une fourmilière.
Le passé est formé d'événements définitivement fixés. L'éphémère présent devient rapidement un passé, fixé à son tour. L'avenir se compose d'éléments non fixés encore, mais déterminés déjà par l'état présent.
Dès qu'un sentiment s'exagère, la faculté de raisonner disparaît.
Les propositions admises sans discussion deviennent rarement des mobiles d'action.
Un dictateur n'est qu'une fiction. Son pouvoir se dissémine en réalité entre de nombreux sous-dictateurs anonymes et irresponsables dont la tyrannie et la corruption deviennent bientôt insupportables.
Si les peuples sont souvent déçus par leurs gouvernants, c'est qu'ils leur demandent de réaliser le meilleur, alors qu'un homme d'Etat ne peut réaliser que le possible.
Un allié trop puissant est parfois aussi redoutable qu'un ennemi déclaré. L'alliance d'un peuple faible avec un peuple fort ne constitue généralement pour le peuple faible qu'une forme atténuée de la servitude.
Pour les diplomates comme pour les femmes, le silence est souvent la plus claire des explications.
On n'arrive à comprendre la philosophie de l'histoire qu'après avoir bien pénétré ce point fondamental de la psychologie des foules : il faut être un dieu pour elles ou n'être rien.
L'éducation est l'art de faire passer le conscient dans l'inconscient.
La mort intellectuelle commence dès que les opinions deviennent trop fixées pour changer. L'homme, même resté jeune, entre alors dans le domaine des morts. Le présent et l'avenir ne sont plus concevables pour lui qu'enveloppés de passé.
La loi seule peut aujourd'hui créer la stabilité. Dès qu'elle cesse d'être respectée, l'anarchie commence.
Les réalités scientifiques les plus solides contiennent toujours, cependant, une part notable d'illusions. Les progrès de la science consistent surtout à la réduire.
La physique est la science du réel, la métaphysique celle de l'irréel, mais jusqu'ici le monde a été beaucoup plus guide par l'irréel que par le réel. La métaphysique reste donc la grande théoricienne du monde.
Les luttes économiques sont parfois aussi ruineuses que les luttes militaires. L'histoire montre qu'elles engendrèrent la décadence de plusieurs pays.
Si, dans leurs relations, les individus se conduisaient avec autant de mauvaise foi et de méfiance que les peuples entre eux, aucune société ne pourrait durer.
Le monde moderne ressemble à une immense ménagerie dont toutes les cages auraient les portes ouvertes.
La soif d'égalité n'est souvent qu'une forme avouable du désir d'avoir des inférieurs et pas des supérieurs.
Les peuples possédant beaucoup de canons ont seuls le droit et le pouvoir d'être pacifistes.
Un extrémiste qui posséderait quelque trace de jugement et de clairvoyance cesserait aussitôt d'être extrémiste.
Refuser d'obéir à un chef, à une loi, à une croyance, en un mot à une contrainte, c'est se condamner à n'avoir pour guides que des impulsions instinctives et retourner, par conséquent, à l'état de barbarie dont les peuples mirent tant de siècles à sortir.
L'homme incapable de dominer ses nerfs est indigne d'occuper le plus humble échelon de la puissance politique.