Images
S'ils s'improvisent conservateurs de la banquise, rapporteurs d'ossements et d'algues, photographes des terres lointaines et des moindres actions de leur vie quotidienne, c'est qu'il y a quelque chose d'encore plus fragile qu'ils veulent sans doute sauver. Pas seulement le lieu où ils se tiennent mais la croyance en un retour- la ville bruyante et la maison lointaine, le lien avec qui les attend.
Hélène Gaudy
On ne sait où est le sol, où est le ciel, que parce que leurs pieds sont posés quelque part. Sans elles, on pourrait aussi bien croire à une falaise de glace qu'à un morceau de sucre tenu entre deux doigts.
Certaines histoires poussent à partir loin avant de revenir au plus proche, au plus intime. Les traces de ces trois hommes réveillent peu à peu le manque de ceux qui partent et des lieux dont on rêve, le souvenir d'un temps où l'on croyait encore à la nécessité de l'aventure et à la permanence des paysages. Et la fascination se mue en écriture, et l'image entraîne le roman.
Ils sont debout devant une forme sombre : un immense ballon tombé, immobile comme un animal échoué. On sent, dans le tissu tendu, le souffle d'un vent, comme si une bouche immense le gonflait encore.
Si l'on omet ces scories, si l'on tente de les soulever comme un voile, il reste, noir sur blanc, près de la masse du ballon, deux silhouettes, comme tenues dans le vide par une main invisible.
Terezín. Drancy. Ces lieux que leurs noms précèdent, dont l'ombre occulte la réalité géographique, humaine.