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Il distingue ses yeux, il lui semble voir ses lèvres, ses mâchoires qui bougent comme avant de parler, mâchant les mots qui empêchent de parler.
Henri Thomas
Je n'ai jamais rien deviné, pas davantage ce qui menace, que ce qui est favorable. Peut-être même n'ai-je jamais rien compris dans les situations de la vie.
Celui qui est aveugle pour tous les détails auxquels les mots correspondent si bien, il ressent ce qui vient de plus loin, ce qui est arrivé et qui continue toujours à arriver.
Je suis quelqu'un à qui il arrive quelque chose qu'il ne comprend pas. C'est le cas de tout le monde quand les gens meurent, et bien souvent dans la vie. C'est le cas de tout le monde, et personne ne le dit, comme si personne ne le savait.
Un ami a quelquefois une bonne idée, que votre malheur vous cachait.
Pour que rien soit vraiment rien, il faut soi-même n'être rien.
La bouche est un peu triste, le visage n'est pas usé, mais comme qui dirait... abusé. Voilà : nuance
Il n'y a pas vraiment de solitude. On ne peut pas la supporter. Seul, on est d'abord hanté par son double - ce qui permet de ne pas être seul - et puis par l'horizon de tous les autres. Il y a l'histoire et toute la fracture sociale autour de nous.
Pour moi, c'est toujours l'esprit qui résiste ; tout le reste est pesanteur.
On n'enseigne pas plus à admirer qu'à s'étonner.
Ce foyer d'impossibles, un écrivain.
L'oeuvre d'un romancier se construit comme une jetée dans la mer : beaucoup de blocs entassés sous l'eau, avant qu'on voit émerger ceux qui constituent la promenade du soir.
Il faut qu'il se dépouille, et soit aidé, pas par les hommes, par le silence, par des choses qui murmurent, et qu'est-ce que ce sera ?
On ne tombe pas dans la solitude, parfois on y monte.
Parlant de Villiers de l'Isle-Adam, Mallarmé disait : Il descendait de son logis pour se mêler à ses dissemblables. C'est exactement ça... Et ils sont fascinants les dissemblables !
Massacrer la langue commune, pour moi, c'est un crime. Comme si on coupait des lignes téléphoniques. Comme si on sabotait des communications essentielles.
Est en dessous du sujet toute critique qui ne participe pas de la poésie même.
Il y a bien autre chose que l'intérêt pour nous obliger.
Ils ne se sentent pas disparaître, eux. Moi, c'est comme si je voyais de temps en temps tout dans une glace, une glace piquée, fêlée, craquée, mais je vois quand même bien que tout se brouille et fiche le camp et ce n'est pas la faute de la glace.
Les yeux ne vieillissent pas, l'alentour prend des rides mais le regard sera le même jusqu'à la mort.
En travaillant, on ne pense plus à l'âge qu'on a ..., mais cela ne préjuge pas de la qualité du travail. Le travail qui fait oublier l'âge et les maux peut très bien n'être que bousillage.
Il y a cinq ans encore, aux moments où je me sentais mal fichu, je pouvais dire "je suis malade à crever" sans en croire un mot. A présent, je ne dirais plus cela, même si j'étais vraiment malade.
L'art est l'éclair fourchu qui brise la nuit et montre par la fente ce qui est ensemble, insupportablement relié par le trait de feu, mortel.
Vous savez, le manque de lecture, c'est terrible... Ce ne sont pas les grands livres qu'on choisit, on choisit par affinité, et, quelquefois, on est bouleversé par un livre qu'on est seul à connaître.
Herbart ne mordra plus dans le bout du pain long ; il a la bouche pleine de la terre de Cabris, il a mangé son éternité, il a le goût de l'éternité, la terre dans la bouche ouverte.
Avant-hier, quand il faisait si beau soleil, une querelle de goélands a eu lieu au-dessus de nous. L'un d'eux vole obliquement vers l'autre et lui flanque un coup de bec.
L'instant de l'extrême fatigue, de l'extrême conscience, de l'extrême raison, veut l'immobilité totale, la non-défense, n'importe comment tu tombes, sur le ventre ou sur le dos.
La poésie est liée au langage. La poésie, c'est le déclenchement de l'harmonie, tandis que, le roman, c'est le déclenchement d'une action. Alors, on y fait passer tout, aussi bien des sentiments que des idées.
La crainte de souffrir et de faire souffrir ... me plongeait dans une sorte d'état aboulique.
Vous savez, la solitude, je dirais presque que ce n'est qu'un mot. On n'en veut pas, de la solitude. La solitude, c'est pour penser aux autres. Je n'ai jamais tant pensé aux autres que quand j'étais seul. Alors peut-on appeler ça de la solitude ?
Entre Rimbaud et n'importe quel pastiche de Rimbaud, il y a une différence.
Aux yeux de la plupart des Américains qui sont croyants, Dieu est l'être le plus riche, lancé par la plus forte publicité.
Le temps sépare les amis, écarte les uns des autres les ennemis, comme un coin qui entre dans un bloc, peu à peu, sous les coups d'un puissant marteau.
Il n'avait pas d'argent, même pas cent sous pour payer son entrée à lui.