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Il nous montre la dynamo reliée à la turbine par des fils et des courroies. Dans la pénombre, les engrenages brillent d'un éclat étrange.
J. M. G. Le Clézio
Chaque chose, chaque être a une indication particulière. Il porte en lui son chant. Il faut être en accord avec lui jusqu'à se confondre.
Il n'y a pas de plus grande émotion que d'entrer dans le désert.
La lumière est très belle et éblouissante comme le bonheur.
On croit toujours qu'il faut illustrer l'idée abstraite avec un exemple du dernier cru, un peu à la mode, ordurier si possible, et surtout - et surtout n'ayant aucun rapport avec la question.
A mon sens, écrire et communiquer, c'est être capable de faire croire n'importe quoi à n'importe qui.
Chaque vie doit s'achever et se résoudre, indépendante, et dépendante de tous, jusqu'à l'ultime fermeture qui l'accomplit et lui donne un sens.
Un corps de vieillard, maigre telle une aigle de blason, et son cou pousse tout seul, dressant en l'air une tête hérissée, aiguë...
Dans la salle d'abattoir blanche et rouge, frappe le coup sourd du marteau au clou acéré qui entre très vite dans la nuque du boeuf.
Il y a des gens qui croient qu'il suffit de penser qu'on a un moteur à la place du coeur, des cylindres dans les poumons, un delco à la place du foie.
Par le langage, l'homme s'est fait le plus solitaire des êtres du monde, puisqu'il s'est exclu du silence.
S'il reste un secret, c'est à l'intérieur de l'âme qu'il se trouve, dans la longue suite de désirs, de légendes, de masques et de chants qui se mêle au temps et resurgit et court sur la peau des peuples à la manière des épars en été.
Elle essayait de rejoindre le temps passé, quand ils étaient couchés dans le sable de la dune, et qu'ils pouvaient croire que tout serait facile, que cela durerait toute leur vie.
Les autres n'attendent que des paroles, ou bien des actes, des preuves, mais lui, le Hartani, il regarde Lalla, avec son beau regard de métal sans rien dire, et c'est dans la lumière de son regard qu'on entend ce qu'il dit, ce qu'il demande.
Chaque après-midi, quand le jour décline, je suis à la poupe du navire, et je regarde le sillage qui brille. C'est l'instant que je préfère, quand tout est paisible, et le pont désert, à part le timonier et un marin qui surveille la mer.
L'île est la certitude de l'irrédemption. La preuve de l'incapacité. L'île est le dernier ponton, la dernière escale avant rien.
Ce qui me tue, dans l'écriture, c'est qu'elle est trop courte. Quand la phrase s'achève, que de choses sont restées au-dehors !
Ensuite il allume le feu avec son briquet à amadou en faisant bien attention à mettre la flamme du côté où il n'y a pas de vent.
Je pensais que dans le fond, Paul était un type malheureux, complexé et tout, et qui voulait cacher sa personnalité.
Sans doute ne devrait-il jamais y avoir d'autre raison au voyage que celle de mesurer exactement ses propres incompétences.
Il s'est passé quelque chose : partout plane la menace d'un passé diluvien, le souvenir qui prend à la gorge.
J'ouvre les yeux, la mer et la lumière me brûlent jusqu'au fond de mon corps, mais j'aime cela. Je respire, je suis libre. Déjà je suis portée par le vent, par les vagues. Le voyage a commencé.
Ecrire, c'est surtout essayer de survivre.
Ils sont apparus, comme dans un rêve, au sommet de la dune, à demi cachés par la brume de sable que leurs pieds soulevaient.
Les yeux sont des moteurs, pour aller dans l'autre sens, vers le futur, vers les pays inconnus, vers les rêves, les choses de cette nature.
Dans la rue, tout me semble écrit. La ville est une architecture d'écriture.
Le bruit doux du jet d'eau de l'arroseur public.
Il frissonnait ; le pyjama de finette était trop léger pour la saison.
L'au-delà, qu'il soit métaphysique ou qu'il soit social, ramène l'homme dans cette situation d'affiliation qui est une sécurité.
C'était dans la mâchoire, au fond de la bouche, probablement sous la dent de sagesse ou sous la molaire dévitalisée, à gauche.
L'eau de pluie cascade le long de l'intérieur du tronc et emplit les creux de l'écorce. La pluie bondit de branche en branche, de feuille en feuille, et de la terre monte une odeur puissante et douce qui se relie à l'enfance.
Les affrontements, le désespoir ou l'angoisse n'ont pas tant de force que la cohésion et le sens de la survie.
Plus rien n'était vrai. Tout était mensonger, pareil aux histoires qu'on raconte aux enfants pour voir leurs yeux briller.
La bulle verte se gonfle, se distend, puis elle explose avec un bruit sec.
Il y avait des flambées de violences inouïes, je ne peux pas oublier cela, dans les rues, des voitures incendiées, des slogans affreux et racistes barbouillés sur les murs, des idées ignobles qui couraient comme un feu sous la cendre.
La vie est une eau qui s'enfuit.
On ne se suicide pas parce que la vie est absurde, ou parce qu'on est abandonné. Ces raisons-là viennent après.
C'était terrible de circuler au milieu des fantômes. La jeune fille regarda vers le plafond, pour apercevoir les orifices des caméras cachées qui filmaient tout le temps.
Les plaques d'isorel recouvrent les paroles, les conditionneurs d'air ronflent dans les murs, et c'est peut-être du HCN qui sort de leurs bouches à grilles.
Les fleuves lavent l'Histoire, c'est connu. Ils font disparaître les corps, rien ne reste très longtemps sur leurs berges.
Les poussières accrochées aux parois de verre du cendrier.
C'est cela le travail du cinéma, de nous montrer l'inachevé dans le temporel, l'infini dans l'éphémère.
Il y a des jours qui sont plus longs que les autres, parce qu'on a faim.
L'histoire de la pensée humaine est, pour les neuf dixièmes, l'histoire d'un vain jeu de cubes où les pièces ne cessent d'aller et venir, usées, abîmées, truquées, s'ajustant mal.
Les hommes sont des coquilles, et le ventre des femmes est la coquille qui contient tous les hommes.
Les grosses fourmis rouges à tête noire marchent sur les aiguilles de pin, hésitent, escaladent les brindilles.
Le silence est revenu encore, plein d'ivresse et de lueurs. Par moments, la musique des chalumeaux s'élançait à nouveau, glissait, puis s'éteignait.
Le silence est l'aboutissement suprême du langage et de la conscience.
Tout ce qui ne va pas dans le sens de l'adhésion au réel n'est que remâchonnement de théories usées, abstraction, décollement. Il y a mille façons d'exprimer ce qui est, mais il n'y a qu'une raison de ne pas fuir.
N'achetez pas de voiture, ne possédez pas de maison, n'ayez pas de situation. Vivez dans le minimum. N'achetez jamais rien. Les objets sont gluants...