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Quand on refuse tout, on peut se permettre tout.
Jacques Chardonne
Il ne faut pas du tout juger l'homme sur ses écrits désespérés. En fait, la vie est assez plate et nous sommes tous à peu près heureux, sauf quelques malades.
Il faut beaucoup d'années pour apprendre certains mots d'amour.
Il semble que rien ne soit plus déterminé que notre caractère et plus difficile à modifier qu'un penchant ou un trait de notre nature.
Le monde échappe à un cerveau raisonnable ; il ne permet que des religions.
Le malheur ne veut pas de résignation ; il est toujours imprévu, exaltant, extraordinaire, et demande une belle âme.
Penser à quoi ? A rien. Cela se nomme la sagesse.
Quand on se plaint de tout, il ne vous arrive rien de bon.
Quelle responsabilité que d'écrire ! Donner de l'espoir sans motif, décourager sans raison.
Une voix répondit : Je l'ai vu courir comme un fou. Il a crié qu'il allait manquer son train.
La sérénité, c'est l'indifférence. Tout le reste est vulgaire.
Le couple, c'est autrui à bout portant. Choisir c'est se livrer.
Ce qu'il faut surmonter nous défait.
Un écrivain est un homme qui a de la chance ; le talent, c'est une chance.
La famille n'est pas la cellule sociale. On peut concevoir une société absolument différente de la nôtre. Mais toujours la famille se reformera. C'est l'amour qui l'impose parce qu'il veut durer.
Les maux réels affectent moins les hommes que l'idée qu'ils se font de leur condition.
On ne devrait jamais se plaindre ; il y a toujours pire.
Les hommes seraient plus heureux si on leur parlait moins de bonheur.
Les filous connaissent bien les règles et en profitent. L'honnête homme est souvent négligent, et distrait...
Seule la perfection est grande. J'ai de la défiance pour le grandiose qui n'est jamais tout à fait réussi.
Les meilleurs divertissements sont les plus futiles.
Je me suis rapproché du Rhin, que je ne traverserai plus jamais. Au-delà se passent des choses qui me soulèvent le coeur.
Les honneurs, le succès, les grades sont à peu près répartis au hasard. Rien ne distingue le vrai mérite. Même l'estime des meilleurs suit la mode. La foule aime tout.
Dans le jardin, un étroit gazon et ses petits monticules de buis entourait la terre des massifs dégarnis entre deux floraisons printanières.
Il n'est pas facile de distinguer dans nos réflexions ce qui se rapporte à nous ou à nos proches. On est habité par ceux qu'on aime ou qu'on hait.
Personne n'est exactement à sa place, Dieu merci ; une stricte justice serait intolérable.
Un romancier ne peut décrire la vie sans l'interpréter ; on lui demande un tableau signé.
L'art n'est qu'un inventaire, mais choisi et transcrit avec dévotion. Il n'y a point de créateurs chez les artistes, il n'y a que des fidèles.
Il faut un peu de savoir, mais ne pas toujours remuer cette sauce.
L'homme et la femme sont identiques, mais longtemps encore des écrivains les décriront comme essentiellement différents.
Sauf la souffrance physique, tout est imaginaire.
Elle voyait des yeux troublés, des enlacements lâches secrètement resserrés, des galopades amusantes.
Dans l'amour parfait, et il existe, on n'ignore pas les défauts de l'être aimé ; mais on les voit sans ressentiment.
J'appellerai libéral celui qui respecte la vie.
Le bien, c'est l'amour. Aimer les autres, c'est détester la souffrance et l'injustice que la société mauvaise entretient.
Les hommes ont inventé des choses qu'ils disent sérieuses. Le principal c'est le divertissement. Ce qui est sérieux n'est pas à notre portée.
L'amour nous perd toujours. Malheureux, il dévaste ; satisfait, il nous dépossède davantage.
Ce n'est pas une idée qui inspire un roman, c'est une émotion légère, pareille au désir.
Malheureux, qui ne peut se réfugier dans ses souvenirs.
On n'a d'ouverture sur un être que si on en est aimé. La femme qu'on aime et qui ne vous aime pas, demeure incompréhensible.
Vivre trop vieux, c'est perdre jusqu'à ses souvenirs.
Pour être heureux par amour il faut une certaine sagesse ; il faut aussi une certaine sagesse pour se passer de l'amour. C'est la même.
Poursuivre le bonheur, au lieu de le laisser venir, n'est-ce pas courir après le reflet d'un mot ? En fait, les hommes seraient plus heureux si on leur parlait moins de bonheur !
Il n'est d'amour sans fidélité... ni jalousie peut-être.
L'amour, au contraire, apporte une vive conscience de son objet ; il veut la présence entière. Cela n'est pas supportable longtemps.
En vérité, ce qui fait le prix de la vie, on ne saurait pas le dire. C'est là sa grandeur.
Le poète, c'est l'homme attentif à des riens.
Il y a un secret pour vivre heureux avec la personne qu'on aime : il ne faut pas vouloir la modifier. Pour corriger un travers qui nous agace, on a bientôt renversé son bonheur.
La paresse est nécessaire. Il faut la mêler à sa vie pour prendre conscience de la vie.
Il faut avoir le courage d'abandonner ses enfants ; leur sagesse n'est pas la nôtre.