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Le doute naît de l'esprit, la foi est fille de l'âme.
Jean Antoine Petit-Senn
L'onde claire du fleuve se trouble en sortant de son lit, comme la sérénité d'une âme s'altère lorsqu'elle se répand dans le monde.
L'ambitieux traite ses amis comme les bâtons d'une échelle. Il s'y cramponne avec les mains pour monter, puis les foule aux pieds.
Pour être bien venu des auteurs, ne soyez jamais de l'avis de leur modestie.
Que de gens ne sont forts que de la faiblesse d'autrui et n'ont de courage qu'avec ceux qui en manquent !
Les vices que nous soupçonnons chez le prochain sont ceux auxquels nous sommes le plus enclins, et nous nous défions de nous-mêmes dans les autres.
Une vieille coquette ne dit ni les années qu'elle a, ni les dents qu'elle n'a plus.
Il est quelque chose de plus doux que le plaisir de recevoir des louanges, c'est le sentiment de les avoir méritées.
L'orgueil a beau s'étaler au grand jour, et le crime se cacher dans l'ombre : le premier ne saurait attirer tous les regards, ni le second les éviter.
Il y a plus de gens ennuyeux parmi ceux qui ont du temps à perdre, que parmi ceux qui ont de l'argent à gagner.
Les réputations de coterie portées à dos d'hommes tombent avec la génération d'épaules qui les soutenait.
Les résolutions magnanimes sont spontanées, la raison ne les modifie qu'en diminuant leur valeur, ainsi l'or pur sortant de la mine, n'acquiert son titre légal que par un alliage qui l'altère.
Une belle âme est comme la flamme qui tend toujours au ciel.
Vieux, nous ne changeons plus guère physiquement aux yeux des autres, car les outrages du temps font sur nous l'effet de taches d'encre sur des habits.
Le temps semble plus rapide à mesure qu'on l'apprécie mieux : l'enfant, pour ses plaisirs, compte sur la longueur des jours quand l'homme, pour ses travaux, se défie de la brièveté des années.
La raison sert aux amoureux comme un cadran solaire à l'ombre.
Regardons, pour faire l'aumône, au besoin que le pauvre en a plutôt qu'à ses titres pour l'obtenir.
Dans tout ce qui l'entoure, l'égoïste ne voit que le cadre de son portrait.
L'avare n'est prodigue que de raisons pour économiser.
Il ne faudrait parler de ses ennemis qu'alors qu'on a du bien à en dire.
Souvent on ne donne certaines choses aux riches que dans l'espoir d'en tirer un meilleur parti que si on les leur vendait.
La beauté et la laideur disparaissent également sous les rides de la vieillesse ; l'une s'y perd, l'autre s'y cache.
Il est plus facile au riche de faire le bien qu'au pauvre de s'abstenir du mal.
On cherche mille raisons pour accuser le vice dans la misère, on en trouve deux mille pour l'excuser dans l'opulence.
Aux yeux des gens dont nous partageons les opinions, nos vices diminuent de moitié et nos vertus croissent du double.
On aiguise deux lames en les frottant l'une contre l'autre ; ainsi deux opinions, ferraillant ensemble, deviennent plus tranchantes, loin de s'émousser.
Vouloir dominer les autres par un ton grossier, c'est croire s'élever en chaussant des sabots.
Une vertu fausse dans le fond est toujours exagérée dans la forme.
L'homme est plus reconnaissant du mal qu'on cesse de lui faire que du bien qu'on ne lui fait plus.
A l'ami qui cesse d'obliger on préfère l'ennemi qui cesse de nuire.
L'homme et sa vanité ont ce rapport avec le tabac, qu'ils s'en vont comme lui en poudre ou en fumée.
Le jeune homme tient moins à la terre que le vieillard ; comme l'arbrisseau, il a peu de racines.
C'est le propre des pensées vraies de ne paraitre jamais nouvelles, car elles sont l'expression de ce qui est.
Faire parade de sa fortune est, pour un sot, la manière d'en jouir.
L'amour avant l'hymen ressemble à une préface trop courte en tête d'un livre sans fin.
Nous ne louons guère les autres que tout juste ce qu'il faut pour qu'on ne les croie pas supérieurs à nous.
On découvre plus vite les défauts d'un honnête homme que les vices d'un fripon.
Si la fortune ne donne pas d'esprit, elle fait du moins que chacun nous en prête.
On loue surtout avec franchise ceux auxquels on est certain d'être supérieur en mérite, parce qu'on s'élève en rehaussant ce qui est au-dessous de soi.
Pour juger de la hauteur d'un épi, on ne le sort point du champ. Pour ne point exagérer l'élévation de notre mérite, il nous faut le comparer à celui des autres.
La retraite nous épargne plus d'ennuis que le monde ne nous donne de plaisirs.
Nul propos n'est indifférent adressé à l'innocence : la candeur, ainsi que la neige, ne reçoit rien dans son sein qui n'y imprime une trace ou une tache.
Le mérite de nos bienfaits diminue s'ils se multiplient ; comme le même son renvoyé par les échos s'afaiblit en se répétant.
Les promesses retiennent mieux les hommes que les bienfaits ; pour eux l'espérance est un câble et la reconnaissance un fil.
Que de puits de science au fond desquels il n'y a que de l'eau claire !
Le pauvre à qui l'on donnait un peu nous regrette plus sincèrement que le riche héritier à qui on laisse tout.
L'insulteur anonyme échange son nom que personne ne connaît contre celui de lâche que tout le monde lui donne.
Si l'on retranchent de nos jours ceux que l'impatience de nos désirs voudroit en ôter, la plus longue vie seroit réduite à peu de chose.
Le mauvais débiteur peut pardonner à qui ne lui prête pas, mais à qui le ferait payer jamais.
On ne peut pas mieux juger un homme sur ses actions d'une heure que le climat d'un pays sur sa température d'un jour.