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Mais qu'est-ce qu'une vie si on ne se la raconte pas ? Et, nous le savons, pour une seule vie, il y a cent biographies possibles.
Jean-Bertrand Pontalis
Il y a bien des façons de passer à l'acte. Se taire en est une.
Aimer, par tous ses sens, l'éphémère.
C'est souvent dans les mots d'un livre que je trouve une interprétation qui m'est destinée.
L'opposition civilisation barbarie s'effondre quand la barbarie est incluse dans la civilisation, quand l'inhumain est au coeur de l'humain.
La tristesse tue l'imagination.
Si nos mères n'étaient pas décevantes, nous ne recevrions rien de ce que, par surprise, offre la vie.
Nous avons inventé les mots pour échapper à la loi de la pesanteur, pour retarder l'instant fatal de la chute.
Ce que je redoute toujours, c'est d'être réduit à un présent qui ne donnerait rien, à un présent muet - muet comme une carte d'identité, comme une pierre tombale. Les mots tuent quand ils nous désignent.
Et puis, s'il fallait souffrir, autant que ce fût pas les femmes.
Privé de la lecture, je serais réduit à n'être que ce que je suis.
Le rêve ignore le néant.
L'art de la fiction n'est que le produit de l'art du rêve.
Dans le domaine qu'on tient pour si subtil, si indéchiffrable, des sentiments - et qui l'est -, ce sont néanmoins les plus grossiers qui opèrent.
Elle lui aura appris, pensera-t-il plus tard, que toute femme est insaisissable, alors même que les hommes se vantent de les prendre.
Le bonheur, c'est la permanence de l'éphémère.
Vouloir se démarquer du troupeau, c'est encore subir la marque du berger.
Selon Freud, toute pulsion s'exprime dans les deux registres de l'affect et de la représentation. L'affect est l'expression qulitative de la quantité d'énergie pulsionnelle et de ses varations.
Pourquoi vouloir immobiliser des écrits qui, au mieux, viennent seulement scander une pensée, une parole, éventuellement une écriture en mouvement ?
Les signes du désamour sont plus visibles que ceux de l'amour.
Ce qu'il y a de plus horrible, dans la vieillesse, c'est que les femmes ne s'intéressent plus à vous alors qu'elles vous intéressent encore.
Nous créons, nous inventons nos objets d'amour.
Ecrire est un vice impuni. Pourquoi quitter l'heureuse place du lecteur pour chercher à s'imposer comme auteur ?
La conversation sans objet, quel luxe !
L'instant, cette précieuse blessure d'un temps autrement voué à l'indifférence.
Le paradoxe du moment présent, c'est qu'il ne se laisse saisir qu'une fois révolu.
Le rêve, notre hystérie secrète ?
En a t-on jamais fini avec la première fois ?
D'où nous viens l'amour des commencements sinon du commencement de l'amour ? De celui qui sera sans suite et peut-être par là sans fin.
Les concepts : nos outils du jour, rien de plus. Ils ignorent l'ombre, ils récusent la nuit.
Peut-être la passion d'écrire résulte-t-elle parfois de l'impuissance à dire, et même à penser. Peut-être n'écrit-on qu'à partir de son aphasie secrète, pour la surmonter autant que pour en témoigner.
Je tiens pour un mort en sursis celui qui considère le temps passé à dormir pour du temps mort. Le sommeil m'est source.
Les ressources que nous offre l'oubli sont le remède le plus sûr à la douleur de la perte.
L'oubli nécessaire pour donner de l'épaisseur au temps, pour accéder au temps sensible. L'épreuve du deuil, de la perte, de la séparation d'avec soi est ce qui nous délivre de la reproduction à l'identique.
Le rêve est une pensée qui ne sait pas qu'elle pense.
Ecrire ce n'est pas traduire un texte antérieur ; c'est s'inspirer du rêver qui donne une forme précaire au désordre insensé de nos désirs, à notre sauvagerie et notre infirmité natives.
On peut trouver du plaisir dans l'exil, quand on l'a choisi.
Est-ce que ça existe, une attente sans espoir ?
La présence de l'ami est discrète, elle n'est jamais intrusive, possessive.
Ne plus rêver, c'est être à demi mort, c'est faire de la réalité sa seule loi.
Un creux est en nous, à jamais, mais le creux n'est pas l'abîme.