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Une longue maladie semble être placée entre la vie et la mort, afin que la mort même devienne un soulagement et à ceux qui meurent et à ceux qui restent.
Jean de La Bruyère
Rien ne fait plus d'honneur au prince que la modestie de son favori.
La vie se passe tout entière à désirer...
Si on le prie de s'asseoir, il se met à peine sur le bord d'un siège ; il parle bas dans la conversation, et il articule mal... Il est pauvre.
Tant que les hommes pourront mourir et qu'ils aimeront à vivre, le médecin sera raillé et bien payé.
À la cour, il faut hasarder quelquefois et jouer de caprice ! Et après toutes ces rêveries et mesures, on est échec, quelquefois mat.
Le guerrier et le politique, non plus que le joueur habile, ne font pas le hasard, mais ils le préparent, ils l'attirent, et semblent presque le déterminer.
C'est trop contre un mari d'être coquette et dévote : une femme devrait opter.
L'éloquence peut se trouver dans les entretiens et dans tout genre d'écrire. Elle est rarement où on la cherche, et elle est quelquefois où on ne la cherche point.
Il n'y a point de chemin trop long à qui marche lentement et sans se presser ; il n'y a point d'avantages trop éloignés à qui s'y prépare par la patience.
La plupart des femmes n'ont guère de principes ; elles se conduisent par le coeur, et dépendent pour leurs moeurs de ceux qu'elles aiment.
Un esprit médiocre croit écrire divinement ; un bon esprit croit écrire raisonnablement.
L'amour qui naît subitement est le plus long à guérir.
La campagne autour est couverte d'hommes qui taillent et qui coupent, qui vont et qui viennent, qui roulent ou qui charrient le bois du Liban, l'airain et le porphyre...
Les hommes commencent par l'amour, finissent par l'ambition, et ne se trouvent souvent dans une assiette plus tranquille que lorsqu'ils meurent.
Il semble qu'il est moins rare de passer de l'antipathie à l'amour qu'à l'amitié.
Les amours meurent par le dégoût, et l'oubli les enterre.
Combien de ces mots aventuriers qui paraissent subitement, durent un temps, et que bientôt on ne revoit plus !
Nous, qui sommes si modernes, serons anciens dans quelques siècles.
A la cour, à la ville, mêmes passions, mêmes faiblesses, mêmes petitesses, mêmes travers d'esprit, mêmes brouilleries dans les familles et entre les proches, mêmes envies, mêmes antipathies.
L'amour et l'amitié s'excluent l'un à l'autre.
Ronsard et Balzac ont eu, chacun dans leur genre, assez de bon et de mauvais pour former après eux de très grands hommes en vers et en prose.
Il y a d'étranges pères, et dont toute la vie ne semble occupée qu'à préparer à leurs enfants des raisons de se consoler de leur mort.
Il y a des lieux que l'on admire : il y en a d'autres qui touchent, et où l'on aimerait à vivre.
Il y a dans quelques hommes une certaine médiocrité d'esprit qui contribue à les rendre sages.
Ah ! Combien de testateurs regretteraient en mourant et leur vie et leurs biens, s'ils pouvaient voir après leur mort les figures de leurs héritiers.
Entre toutes les différentes expressions qui peuvent rendre une seule de nos pensées, il n'y en a qu'une qui soit la bonne.
Qui est plus esclave qu'un courtisan assidu, si ce n'est un courtisan plus assidu ?
La plupart des hommes emploient la meilleure partie de leur vie à rendre l'autre misérable.
Corneille peint les hommes comme ils devraient être ; Racine les peint tels qu'ils sont.
Le devoir des juges est de rendre la justice ; leur métier est de la différer ; quelques-uns savent leur devoir et font leur métier.
Ceux qui emploient mal leur temps sont les premiers à se plaindre de sa brièveté.
Le sage guérit de l'ambition par l'ambition même ; il tend à de si grandes choses, qu'il ne peut se borner à ce qu'on appelle des trésors, des postes, la fortune et la faveur.
Il n'y a point au monde un si pénible métier que celui de se faire un grand nom : la vie s'achève que l'on a à peine ébauché son ouvrage.
Qui peut n'être pas convaincu de son inutilité, quand il considère qu'il laisse en mourant un monde qui ne se sent pas de sa perte, et où tant de gens se trouvent pour le remplacer ?
Il faut rire avant que d'être heureux, de peur de mourir sans avoir ri.
Il est bon qu'il y ait dans le Monde des biens et des maux : sans cela, on serait désespéré de quitter la vie.
Quelques-uns se défendent d'aimer et de faire des vers, comme de deux faibles qu'ils n'osent avouer, l'un du coeur, l'autre de l'esprit.
Quel moyen de comprendre, dans la première heure de la digestion, qu'on puisse quelque part mourir de faim ?
Il est aussi difficile de trouver un homme vain qui se croie assez heureux, qu'un homme modeste qui se croie trop malheureux.
Il y a de petits défauts que l'on abandonne volontiers à la censure, et dont nous ne haïssons pas à être raillés : ce sont de pareils défauts que nous devons choisir pour railler les autres.
Je ne sais si un bienfait qui tombe sur un ingrat, et ainsi sur un indigne, ne change pas de nom, et s'il méritait plus de reconnaissance.
L'avare dépense plus mort en un seul jour, qu'il ne faisait vivant en cinq années ; et son héritier plus en dix mois, qu'il n'a su faire lui-même en toute sa vie.
Toute confiance est dangereuse si elle n'est entière ; il y a peu de conjonctures où il ne faille tout dire ou tout cacher. On a déjà trop dit de son secret à celui à qui l'on croit devoir en dérober une circonstance.
Il est abstrait, rêveur, et il a avec de l'esprit l'air d'un stupide.
Un beau visage est le plus beau de tous les spectacles ; et l'harmonie la plus douce est le son de voix de celle que l'on aime.
Parler et offenser, pour de certaines gens, est précisément la même chose. Ils sont piquants et amers ; leur style est mêlé de fiel et d'absinthe : la raillerie, l'injure, l'insulte leur découlent des lèvres comme leur salive.
Une belle femme qui a les qualités d'un honnête homme est ce qu'il y a au monde d'un commerce plus délicieux : l'on trouve en elle tout le mérite des deux sexes.
Ce qu'on appelle humeur est une chose trop négligée parmi les hommes : ils devraient comprendre qu'il ne leur suffit pas d'être bons, mais qu'ils doivent encore paraître tels.
Je ne mets au-dessus d'un grand politique que celui qui néglige de le devenir, et qui se persuade de plus en plus que le monde ne mérite point qu'on s'en occupe.