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Dans tous les cas, la poésie est antérieure à la prose : on dirait que l'homme chante avant de parler.
Jorge Luis Borges
Dormir est se distraire de l'univers.
Je suis un homme lâche : je ne lui donnais pas mon adresse pour m'éviter l'angoisse d'attendre des lettres.
La nuit aveuglait les chemins.
Mieux vaut périr exécuté que de se donner soi-même la mort.
J'écris pour moi, pour mes amis et pour adoucir le cours du temps.
La certitude que tout est écrit nous annule ou fait de nous des fantômes.
Heureux les aimés et les aimants et ceux qui peuvent se passer de l'amour.
L'ambiguïté est une richesse.
Heureux ceux qui gardent dans leur mémoire des paroles de Virgile ou du Christ, parce qu'elles éclairent leurs jours.
Dans le rêve de l'homme qui rêvait, le rêvé s'éveilla.
Qui a entrevu l'univers, qui a entrevu les ardents desseins de l'univers ne peut plus penser à un homme, à ses banales félicités ou à ses bonheurs médiocres, même si c'est lui cet homme.
Loué soit l'infini - Labyrinthe des effets et des causes, - Qui, avant de me présenter le miroir - Dans lequel je ne verrai personne ou je verrai un autre, - M'accorde la pure contemplation - D'un langage de l'aube.
Modifier le passé n'est pas modifier un seul fait ; c'est annuler ses conséquences qui tendent à être infinies. En d'autres termes, c'est créer deux histoires universelles.
Il y a des communistes qui soutiennent qu'être anticommuniste, c'est être fasciste. C'est aussi incohérent que de dire que ne pas être catholique, c'est être mormon.
Une doctrine philosophique est au début une description vraisemblable de l'univers ; les années tournent et c'est un pur chapitre - sinon un paragraphe ou un nom - de l'histoire de la philosophie.
Ce que fait un homme c'est comme si tous les hommes le faisaient. Il n'est donc pas injuste qu'une désobéissance dans un jardin ait pu contaminer l'humanité ; il n'est donc pas injuste que le crucifiement d'un seul juif ait suffi à la sauver.
Nous sentons la poésie comme nous sentons la présence d'une femme, ou comme nous sentons le voisinage d'une montagne ou d'une baie.
Etre immortel est insignifiant ; à part l'homme, il n'est rien qui ne le soit, puisque tout ignore la mort. Le divin, le terrible, l'incompréhensible, c'est de se savoir immortel.
J'éprouvai ... du remords à ne sentir aucun remords.
Il n'y a pas de plaisir plus complexe que celui de la pensée.
... son destin était de chanter et de faire résonner dans la concave mémoire humaine.
Mourir pour une religion est plus simple que de la vivre pleinement.
Les raisons qu'un homme peut avoir pour en haïr un autre ou l'aimer sont infinies.
Ne hais pas ton ennemi, car si tu le fais tu es en quelque façon son esclave. Ta haine ne sera jamais meilleure que ta paix.
Il n'y a pas de classement de l'univers qui ne soit arbitraire et conjectural. La raison en est très simple : nous ne savons pas quelle chose est l'univers.
Bienheureux ceux qui souffrent persécution pour cause de justice, parce que la justice leur importe plus que leur destin d'homme.
Le rêve d'un homme fait partie de la mémoire de tous.
... prévoir un détail circonstanciel, c'est empêcher que celui-ci se réalise.
Regarder la rivière qui est de temps et d'eau et se souvenir que le temps est une autre rivière, savoir que nous nous perdons comme la rivière et que les visages passent comme l'eau.
On perd toujours l'essentiel. C'est une - Loi de toute parole sur le Divin.
Faire le bien à ton ennemi est le meilleur moyen de complaire à ta vanité.
Tous les hommes, au moment vertigineux du coït, sont le même homme. Tous les hommes qui répètent une ligne de Shakespeare, sont William Shakespeare.
Je n'ai été sollicité tout au long de ma vie que par un nombre restreint de sujets ; je suis définitivement monotone.
Depuis toujours, il y a quelque chose qui me plaît à Buenos Aires. Qui me plaît tellement que je n'aime pas que cela plaise à d'autres. Voilà, c'est un amour jaloux.
Une lenteur toute pédagogique.
L'argot, en fait, est une blague littéraire inventée par des auteurs de comédies et des paroliers de tangos ; les gens de faubourg l'ignorent, à moins que les disques d'un phonographe ne le leur aient enseigné.
A mon époque, il n'y avait pas de best-sellers, et nous ne pouvions pas nous prostituer. Nous n'aurions pas trouvé de clients.
Dieu ne doit pas faire de théologie ; l'écrivain ne doit pas anéantir par des raisonnements humains la foi momentanée que l'art exige de nous.
L'univers (que d'autres nomment la Bibliothèque) se compose d'un nombre indéfini, et peut-être infini, de galeries hexagonales, avec au centre de vastes puits d'aération bordés par des ballustrades très basses.
Que la lumière d'une lampe s'allume, même s'il n'y a pas d'homme pour la voir. Dieu le verra.
La mort (ou son allusion) rend les hommes précieux et pathétiques.
Le monde, selon Mallarmé, n'existe que pour un livre selon Bloy, nous sommes les versets, les paroles ou les lettres d'un livre magique, et ce livre incessant est la seule chose qui existe au monde : plus exactement, est le monde.
Que chaque homme construise sa propre cathédrale. Pourquoi se contenter des oeuvres des autres et de celles du passé ?
L'histoire universelle est celle d'un seul homme.
(En parlant d'un vieillard) Un grand nombre d'années l'avaient réduit et poli comme les eaux font une pierre et les générations une maxime.
Que voulez-vous que je dise de moi ? Je ne sais rien de moi ! Je ne sais même pas la date de ma mort.
Comme tout possesseur d'une bibliothèque, Aurélien se savait coupable de ne la point connaître à fond.
Bioy Casarès se rappela alors qu'un des hérésiarques d'Uqbar avait déclaré que les miroirs et la copulation étaient abominables, parce qu'ils multipliaient le nombre des hommes.
Ce que nous perdons le temps ne le refait pas, l'éternité le garde pour la gloire et aussi pour le feu.