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Résiste au mal, mais sans surprise et sans colère. À qui te frapperait sur la joue droite tu peux tendre l'autre, pourvu que ce ne soit pas la peur qui t'y pousse.
Jorge Luis Borges
Nous remettons au lendemain tout ce qui peut être remis ; nous savons peut-être profondément que nous sommes immortels et que, tôt ou tard, tout homme fera tout et saura tout.
Les mots sont des symboles qui postulent une mémoire partagée.
Les actions des hommes ne méritent ni la flamme ni les cieux.
Son livre s'appelait le livre de sable, parce que ni ce livre ni le sable n'ont de commencement ni de fin.
L'homme oublie qu'il est un mort qui converse avec des morts.
Omettre toujours un mot, avoir recours à des métaphores inadéquates et à des périphrases évidentes, est peut-être la façon la plus démonstrative de l'indiquer.
La gloire agrandit.
Un homme qui pense cinq minutes à une femme n'est pas un homme mais une lopette.
J'errai de longs jours sans trouver de l'eau, ou un seul jour immense, multiplié par le soleil, la soif et la crainte de la soif.
Les rêves sont l'activité esthétique la plus ancienne.
On ne peut mesurer le temps avec des jours, comme on compte l'argent en centimes ou en pesos, parce que les pesos sont tous pareils tandis que chaque jour est différent, et peut-être même chaque heure.
L'origine d'une haine, comme la naissance d'autres passions, est toujours mystérieuse.
On dit qu'il n'existe pas de génération d'où ne sortent quatre hommes intègres qui étayent secrètement l'univers et le justifient devant le Seigneur.
L'ordre inférieur est un miroir de l'ordre supérieur ; les formes de la terre correspondent aux forment du ciel ; les taches de la peau sont une carte des constellations incorruptibles ; Judas reflète Jésus en quelque sorte.
Dieu meut le joueur et le joueur, la pièce. - Quel dieu, derrière Dieu, commence cette trame - De poussière et de temps, de rêves et de larmes ?
J'ai adhéré au parti conservateur, ce qui est une façon d'être sceptique.
On observera que la conclusion précéda sans doute les preuves. Qui se résigne à chercher des preuves d'une chose à laquelle il ne croit pas ou dont la prédication ne l'intéresse pas ?
Il arrive des choses que l'on ne comprend qu'ensuite, petit à petit, avec le temps.
Toute la métaphysique n'est qu'une partie de la littérature fantastique.
Que le ciel existe, même si ma place est en enfer.
Le monde est, pour l'Européen, un cosmos, à l'intérieur duquel chacun est en accord intime avec la fonction qu'il exerce ; pour l'Argentin, le monde est un chaos.
Hemingway, qui était un peu prétentieux, a fini par se suicider parce qu'il s'est rendu compte qu'il n'était pas un grand écrivain. Cela le réhabilite, partiellement.
... le mythe est au principe de la littérature et ... il est aussi à son terme.
L'oubli et la mémoire sont également inventifs.
Je crois qu'avec le temps nous mériterons qu'il n'y ait plus de gouvernement.
Heureux celui qui ne s'acharne pas à avoir raison, parce que personne n'a raison, ou tous.
Nous pouvons mentionner ou évoquer, mais jamais exprimer.
Etre amoureux, c'est se créer une religion dont le dieu est faillible.
Il n'est pas nécessaire de construire un labyrinthe quand l'Univers déjà en est un.
J'ai été Homère ; bientôt, je serai Personne, comme Ulysse ; bientôt, je serai tout le monde : je serai mort.
Je crois que la poésie est quelque chose qu'on sent, et si vous ne sentez pas la poésie, la beauté d'un texte, si un récit ne vous donne pas l'envie de savoir ce qui s'est passé ensuite, c'est que l'auteur n'a pas écrit pour vous.
Délire laborieux et appauvrissant que de composer de vastes livres, de développer en cinq cent pages une idée que l'on peut très bien exposer oralement en quelques minutes.
Rechercher ses précurseurs, ce n'est pas se livrer à une misérable tâche de caractère juridique ou policier ; c'est sonder les mouvements, les tâtonnements, les aventures, les intuitions et les prémonitions de l'esprit humain.
Le livre est un vague amas de brouillons contradictoires. Je l'ai examiné une fois : au troisième chapitre le héros meurt, au quatrième il est vivant.
Peut-on menacer d'autre chose que de mort ? Ce qui serait intéressant, original, serait de menacer d'immortalité.
Pour l'Argentin, l'amitié est une passion et la police une mafia.
On ne bâtit rien sur la pierre, tout sur le sable, mais notre devoir est de bâtir comme si le sable était pierre...
Il faudrait inventer un jeu dans lequel personne ne gagne.
Je trouve que l'enfer et le paradis sont disproportionnés. Les actes des hommes n'en méritent pas tant.
Cherche pour le plaisir de chercher, non de trouver...
Les catholiques croient en un monde de l'au-delà, mais j'ai remarqué qu'ils ne s'y intéressent pas. C'est le contraire pour moi : ce monde m'intéresse, et je n'y crois pas.
La démocratie, ce curieux abus de la statistique.
Ne juge pas l'arbre à ses fruits ni l'homme à ses œuvres ; elles peuvent être meilleures ou pires.
L'acteur, sur une scène, joue à être un autre, devant une réunion de gens qui jouent à le prendre pour un autre.
Cet été, j'aurai cinquante ans ; - La mort me dégrade, incessamment.
L'amitié n'est pas moins mystérieuse que l'amour ou l'une quelconque des facettes de cette chose confuse qu'est la vie. Je me suis dit parfois que seul le bonheur est sans mystère, car il se justifie par lui-même.
Penser c'est oublier des différences, c'est généraliser, c'est abstraire.
Aimer c'est sentir qu'il nous manque quelque chose.
Je n'écris pas pour une petite élite dont je n'ai cure, ni pour cette entité platonique adulée qu'on surnomme la Masse... j'écris pour moi, pour mes amis et pour adoucir le cours du temps.