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Paris c'est ma ville, l'endroit où je suis née au monde de l'esprit. Je suis à chaque fois éblouie par ses lumières, son architecture, ses ponts, ses jardins. L'une des plus belles villes du monde je pense et j'en ai vu beaucoup. Si on enlève les voitures, c'est la plus belle !
Juliette Gréco
Dans tout ce que je chante et dans ma vie, je suis là quelque part.
Je ne vais pas au soleil, je m'ennuie. J'aime le regarder, mais faire le rôti un quart d'heure par livre, ça ne m'intéresse pas !
Je n'ai connu que la ferveur. Toute ma vie n'est que ferveur, refus, amour, combat.
Je ne porte pas un intérêt particulier à moi-même, vous savez. J'ai du respect pour moi, parce que je reste cohérente et que je suis folle. Folle de passion, folle d'amour... Mais je ne suis pas narcissique.
Brel, je l'ai découvert dans un cinéma renommé du quartier de Pigalle, le Gaumont Palace. Il était grand et beau. Oui, beau, contrairement à ce qu'il croyait, et à ce que les gens conventionnels disaient. Il avait une beauté unique, parce qu'il était "beau à l'intérieur".
Je n'ai jamais réussi à trouver quelqu'un d'assez riche pour me faire renoncer à ma liberté de penser. Jamais.
J'aime le sud viscéralement. J'aime le soleil mais je m'y ennuie à périr. La chaleur, la sueur m'empêchent de penser, donc je ne peux pas m'amuser au soleil. J'aime les gens du nord, formidablement courageux. Ils n'ont pas ce soleil, cette douceur, ce climat magnifique. Et ce qu'apporte la mer, cette notion d'infini, de rêve.
La chanson est un art particulier, extrêmement difficile (quand c'est bien), contrairement à ce qu'on peut croire. Il faut écrire une pièce de théâtre ou un roman en 2 minutes ½ / 3 minutes et c'est un exercice extraordinaire. C'est grave, une chanson. Ça va dans les oreilles de tout le monde, ça se promène dans la rue, ça traverse la mer, c'est important une chanson, ça accompagne votre vie...
Ce n'est pas si simple de dire "au revoir et merci" ! C'est extrêmement compliqué, très douloureux parfois.
On vit un moment très étrange. Pourquoi vouloir s'imposer par la violence et la terreur. Il y a la parole ! On devrait parler "avec" tout le monde, échanger, proposer, tendre la main.
Gréco, c'est un nom chargé de mémoire, d'histoire. C'est celui qui vient de Grèce, celui qui vient d'ailleurs.
Chanter, c'est tout donner et recevoir la vibration du public... On entre sur scène, les gens se taisent, applaudissent, vous écoutent. C'est invraisemblable.
C'est une place merveilleuse d'être interprète.
J'étais éblouie par Brel. Ses yeux étaient ardents comme des braises. Je lui ai dit : Je prends une de vos chansons, la plus difficile à défendre. Mais vous allez chanter vos chansons tout seul.
Je suis là pour servir, je suis interprète.
Je me dis que je serai sans doute morte avant de m'arrêter. C'est une chose que très secrètement au fond de moi, je crois que je souhaite.
On entre sur scène, les gens se taisent, applaudissent, vous écoutent. C'est invraisemblable.
J'ai toujours eu besoin d'être seule. Seule pour pouvoir travailler en moi. Sans cela, je n'entends rien.
J'ai été gâtée comme je souhaite à tout le monde de l'être. Je suis comme je suis est une chanson que Prévert avait écrite pour Arletty et qu'il a voulu que je chante. De même que Les Feuilles mortes : c'est lui qui m'a demandé de les chanter...
Ce "Merci !" il s'adresse à mon public qui m'a tout donné, qui a fait de ma vie une sorte de rêve éveillé. Il m'a donné tous les bonheurs du monde. Je veux lui dire "merci".
J'ai toujours une force en moi qui se révolte. Tant que je ne suis pas morte, il n'y a rien à faire : je me lève.
Je suis de moins en moins bête, ce qui me permet de réaliser de façon de plus en plus aiguë le miracle qu'est notre métier. On entre sur scène, les gens se taisent, applaudissent, vous écoutent. C'est invraisemblable.
Je sais seulement que j'ai un curieux pouvoir : celui de ne pas être devenue adulte. Du tout. Dans la vie, il faut être grave. Désespéré. Heureux. Passionné. Émerveillé. Mais pas sérieux, non ! Le jour où on se prend au sérieux, on meurt un peu. Moi, je suis vieille, mais je ne suis pas adulte.
Je suis là pour vivre ! Faire l'amour n'a jamais fait de mal à personne.
Ma mère ne voulait pas de moi. Elle m'a dit que j'étais le "fruit d'un viol". Longtemps, j'ai cherché un arbre qui s'appelait le viol...
Je suis là pour servir. Il y a une belle phrase dans la Bible, qui dit : "Je suis la servante du Seigneur, qu'il me soit fait selon votre parole." Et moi, mes Seigneurs, ce sont les écrivains et les musiciens. Je suis là pour servir, je suis interprète.
Moi, j'aime, je veux bien tout donner, je ne demande rien. Je les enveloppe, je les installe, je les mets au chaud, et d'un coup j'en ai marre de les voir s'endormir. Je me fatigue, le secret du départ est là.
Mes Seigneurs, ce sont les écrivains et les musiciens. Je suis là pour servir, je suis interprète.
La scène, ce n'est pas qu'un métier. C'est une manière de vivre. Je me réveille tous les matins en disant "merci". Merci au jour qui m'est donné. A celui que j'ai eu la veille, si j'ai bien travaillé.
Je suis méditerranéenne. Mon père était corse et ma mère bordelaise. Les femmes de Bordeaux étaient habillées de noir et les femmes corses aussi. Quand il a fallu que je trouve quelque chose pour mettre sur mon dos, j'ai acheté un pantalon noir et un chandail noir.
Quand on a ce qu'on appelle joie, cela doit se voir sur le visage. On est plus beau. La joie rend beau. Plus beau qu'on est, à coup sûr. Joie, moment de bonheur.
On peut me reprocher d'avoir eu une vie dissipée, ce qui est rigoureusement exact, mais on ne peut pas me reprocher d'avoir aimé vivre. Je suis là pour vivre ! Faire l'amour n'a jamais fait de mal à personne !
L'âge, je m'en fous. Je n'ai pas l'impression d'être vieille. Je ne pense pas vieux, je pense demain ! Je n'ai jamais pensé hier, pourtant j'ai de quoi !
Nous sommes en pleine régression. Nous retournons au Moyen Âge, aux guerres de Religion qui sont extrêmement dangereuses et qui font que s'est installée la méfiance, le rejet en même temps que la peur de l'autre. On vit un moment très étrange.
Interprète, c'est un métier formidable et les auteurs parfois sont surpris quand ils redécouvrent leur texte.
Je ne suis pas autre chose que moi. Je suis plutôt gaie, joyeuse, farceuse, très rarement de mauvaise humeur. On peut me reprocher d'avoir eu une vie dissipée, ce qui est rigoureusement exact, mais on ne peut pas me reprocher d'avoir aimé vivre.
Je suis comme ça. Je vis ce que je dis intensément. Il faut servir les textes du mieux qu'on peut.
Je suis totalement vulnérable. J'ai cette force de me présenter sur scène parce que j'ai une confiance absolue dans mes auteurs-compositeurs. Je sais que je suis une bonne interprète parce qu'on me l'a dit. Mais j'ai mis du temps à accepter. Je suis la servante de mes seigneurs !
Moi, j'offre ce que je peux. Il paraît que je donne de l'énergie. Tant mieux. La moindre des courtoisies, c'est d'être positif. Je veux faire des progrès. Et j'en fais. Je chante bien mieux qu'avant. Et bien mieux qu'il y a deux ans.
La solitude peut être extrêmement cruelle, extrêmement douloureuse, mais je m'en suis arrangée. J'ai appris à lire, à entendre. J'aimais écouter. J'ai posé des questions, on m'a répondu. J'ai eu une culture étrange et somptueuse.
J'ai pris la décision d'arrêter parce que c'est une question de dignité, de courtoisie et d'amour. S'accrocher, ce n'est pas bien.
Je dois beaucoup à beaucoup de monde, j'ai eu la chance de tomber sur des hommes et des femmes qui, en plus d'être des génies, ce que j'ignorais, étaient des êtres humains.
Ce qui nous reste d'enfance. Joie de rire, joie de voir des belles personnes, joie du spectacle, joie de la victoire, joie à en éclater de rire. Quand on a ce qu'on appelle joie, cela doit se voir sur le visage. On est plus beau. La joie rend beau. Plus beau qu'on est, à coup sûr. Joie, moment de bonheur.
Le temps qui passe ? Je m'en fous. Tant que je marche, que je cause, que j'entends, que je vois, j'ignore le temps. Si je m'arrête, je saurai peut-être que le temps passe. Mais, pour l'instant, non. Il paraît que c'est le premier mot que j'ai dit : Non !
La mort est une chose normale, pourquoi en faire une affaire ? On n'est pas si important que ça. J'ai compris que j'allais mourir quand mon grand-père est décédé. J'avais sept ans. J'ai su que ça existait et j'ai accepté ça très bien.
J'ai eu les meilleurs professeurs du monde, rencontré les plus grands musiciens, peintres, écrivains, poètes.
Sartre et Beauvoir étaient des gens magnifiques. Mais je les soupçonne d'avoir été jaloux l'un de l'autre. Beauvoir avait beaucoup d'affection pour moi. Mais je ne suis pas entrée dans son jeu...
Les poètes, les musiciens, ils ont besoin d'interprètes. Ils ne sont pas toujours les meilleurs interprètes de leurs œuvres, ce n'est pas vrai. Quelquefois, nous, interprètes, nous trouvons des choses qu'ils n'ont pas entendues, d'eux-mêmes…
Les mots arrivent en moi, je les entends, je vis avec eux.