Images
Les changements nécessaires aux Etats se font presque toujours d'eux-mêmes.
Luc de Clapiers
Quelque amour qu'on ait pour les grandes affaires, il y a peu de lectures si ennuyeuses et si fatigantes que celle d'un traité entre des princes.
Les espérances les plus ridicules et les plus hardies ont été quelquefois la cause des succès extraordinaires.
Le désespoir est la plus grande de nos erreurs.
Ce sont les ouvrages médiocres qu'il faut abréger. Je n'ai jamais vu de préface ennuyeuse à la tête d'un bon livre.
Les méchants sont toujours surpris de trouver de l'habileté dans les bons.
Nous avons d'assez bons préceptes, mais peu de bons maîtres.
C'est une chose remarquable que presque tous les poètes se servent des expressions de Racine, et que Racine n'ait jamais répété ses propres expressions.
La stérilité de sentiment nourrit la paresse.
Un autre défaut de la mauvaise poésie est d'allonger la prose, comme le caractère de la bonne est de l'abréger.
Est-ce force dans les hommes d'avoir des passions, ou insuffisance et faiblesse ? Est-ce grandeur d'être exempt de passions, ou médiocrité de génie ? Ou tout est-il mêlé de faiblesse et de force, de grandeur et de petitesse ?
On ne s'élève point aux grandes vérités sans enthousiasme ; le sang froid discute et n'invente point ; il faut peut-être autant de feu que de justesse pour faire un véritable philosophe.
Il y a plus de sérieux que de folie dans l'esprit des hommes. Peu sont nés plaisants ; la plupart le deviennent par imitation, froids copistes de la vivacité et de la gaîté.
Personne ne veut être plaint de ses erreurs.
Il ne faut pas jeter du ridicule sur les opinions respectées ; car on blesse par là leurs partisans, sans les confondre.
Lorsqu'on ne veut rien perdre ni cacher de son esprit, on en diminue d'ordinaire la réputation.
Ceux qui font des métiers infâmes, comme les voleurs, les femmes perdues, se font gloire de leurs crimes, et regardent les honnêtes gens comme des dupes : la plupart des hommes, dans le fond du coeur, méprisent la vertu, peu la gloire.
La présence d'esprit est plus nécessaire à un négociateur qu'à un ministre : les grandes places dispensent quelquefois des moindres talents.
La conviction de l'esprit n'entraîne pas toujours celle du coeur.
Ceux qui manquent de probité dans les plaisirs n'en ont qu'une feinte dans les affaires : c'est la marque d'un naturel féroce, lorsque le plaisir ne rend point humain.
Les réputations mal acquises se changent en mépris.
Le terme du courage est l'intrépidité dans le péril.
Quelques hommes seraient bien étonnés d'apprendre ce qui leur fait estimer d'autres hommes.
Il faut de la sincérité et de la droiture, même pour séduire.
Nous avons des règles pour le théâtre qui passent peut-être les forces de l'esprit humain, et que les plus heureux génies n'exécutent que faiblement.
Nous avons si peu de vertu, que nous nous trouvons ridicules d'aimer la gloire.
Je ne puis mépriser un homme, à moins que je n'aie le malheur de le haïr pour quelque mal qu'il m'a fait ; je ne comprends pas le dédain paisible que l'on nourrit de sang-froid pour d'autres hommes.
Tous les hommes naissent sincères, et meurent trompeurs.
C'est un malheur que les hommes ne puissent d'ordinaire posséder aucun talent sans avoir quelque envie d'abaisser les autres.
On tire peu de services des vieillards.
Le monde est peuplé d'esprits froids, qui n'étant pas capables par eux-mêmes d'inventer, s'en consolent en rejetant toutes les inventions d'autrui, et qui méprisant au-dehors beaucoup de choses, croient se faire plus estimer.
L'esprit ne fait pas connaître la vertu.
La loi des esprits n'est pas différente de celles des corps, qui ne peuvent se maintenir que par une continuelle nourriture.
Il vaut mieux déroger à sa qualité qu'a son génie : ce serait être fou de conserver un état médiocre, au prix d'une grande fortune ou de la gloire.
La gloire remplit le monde des vertus, et, comme un soleil bienfaisant, elle couvre toute la terre de fleurs et de fruits.
Si le mérite donnait une partie de l'autorité qui est attachée à la fortune, il n'y a personne qui ne lui accordât la préférence.
Pour se donner, il faut s'appartenir.
On n'est pas né pour la gloire, lorsqu'on ne connaît pas le prix du temps.
Il faut être né raisonnable ; car on tire peu de fruit des lumières et de l'expérience d'autrui.
L'orgueil est le consolateur des faibles.
Le secret des moindres plaisirs de la nature passe par la raison.
La netteté épargne les longueurs, et tient lieu de preuves aux idées.
Lorsqu'on est pénétré de quelque grande vérité et qu'on la sent vivement, il ne faut pas craindre de la dire, quoique d'autres l'aient déjà dite Toute pensée est neuve, quand l'auteur l'exprime d'une manière qui est à lui.
On oblige les jeunes gens à user de leurs biens comme s'il était sûr qu'ils dussent vieillir.
La haine est plus vive que l'amitié, moins que la gloire.
Tous les sujets de la beauté ne connaissent pas leur souveraine.
Ceux qui se moquent des penchants sérieux aiment sérieusement les bagatelles.
La sagesse est le tyran des faibles.
C'est une marque de férocité et de bassesse d'insulter à un homme dans l'ignominie, s'il est, d'ailleurs, misérable ; il n'y a point d'infamie dont la misère ne fasse un objet de pitié pour les âmes tendres.
Il n'y a point de faiseur de stances qui ne se préfère à Bossuet, simple auteur de prose ; et, dans l'ordre de la nature, nul ne doit penser aussi peu juste qu'un génie manqué.