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Mais l'historien n'a rien d'un homme libre. Du passé, il sait seulement ce que ce passé même veut bien lui confier. En outre, lorsque la matière qu'il s'efforce d'embrasser est trop vaste pour lui permettre le dépouillement personnel de tous les témoignages, il se sent incessamment limité, dans son enquête, par l'état des recherches.
Marc Bloch
Il est deux catégories de Français qui ne comprendront jamais l'histoire de France, ceux qui refusent de vibrer au souvenir du sacre de Reims ; ceux qui lisent sans émotion le récit de la fête de la Fédération.
"De la Terre", écrivait Platon, "nous n'habitons que cette partie qui s'étend depuis le Phase jusqu'aux Colonnes d'Hercule, répandus autour de la mer comme des fourmis ou des grenouilles autour d'un étang."
Il est des contradictions qui ressemblent fort à des évasions. Passe-t-on des individus à la société ?
Je ne revendique jamais mon origine que dans un cas : en face d'un antisémite.
L'historien n'a rien d'un homme libre. Du passé, il sait seulement ce que ce passé même veut bien lui confier.
Peut être serait-ce un bienfait, pour un vieux peuple, de savoir plus facilement oublier : car le souvenir brouille parfois l'image du présent et l'homme, avant tout, a besoin de s'adapter au neuf.
Le démon des origines est l'avatar de cet autre satanique ennemi de la véritable histoire : la manie du jugement.
La mission d'un livre n'est jamais mieux remplie que le jour où les conclusions en sont contestées.
C'est quand les hommes cessent d'être d'accord que leur histoire devient claire.
Une invention ne se répand guère que si la nécessité sociale en est largement ressentie.
Jadis, des hommes qui n'étaient ni des sots, ni, devant le péril personnel, des lâches, avaient eux aussi trop promptement succombé devant l'infortune. À leur mémoire, l'histoire militaire ne réserve que mépris.
Robespierristes, anti-robespierristes, nous vous crions grâce : par pitié, dites-nous simplement quel fut Robespierre. Encore si le jugement ne faisait que suivre l'explication le lecteur en serait quitte pour sauter la page. Par malheur à force de juger, on finit presque fatalement par perdre jusqu'au goût d'expliquer.
Être un vrai chef, c'est, avant tout peut-être, savoir serrer les dents ; c'est insuffler aux autres cette confiance que nul ne peut donner s'il ne la possède lui-même ; c'est refuser, jusqu'au bout, de désespérer de son propre génie ; c'est accepter, enfin, pour ceux que l'on commande en même temps que pour soi, plutôt que l'inutile honte, le sacrifice fécond.
En un mot, alors que nos chefs ont prétendu renouveler la guerre de 1915-1918, les Allemands faisaient celle de 1940.