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Tout organisme est une mélodie qui se chante elle-même.
Maurice Merleau-Ponty
Le soleil et la pluie ne sont ni gais ni tristes, l'humeur ne dépend que des fonctions organiques élémentaires, le monde est affectivement neutre.
La pensée se réduit délibérément à l'ensemble des techniques de prise ou de captation qu'elle invente.
Dans la perception nous ne pensons pas l'objet et nous ne nous pensons pas le pensant, nous sommes à l'objet et nous nous confondons avec ce corps qui en sait plus que nous sur le monde, sur les motifs et les moyens qu'on a d'en faire la synthèse.
L'action politique est de soi impure parce qu'elle est action de l'un sur l'autre et parce qu'elle est action à plusieurs.
Si philosopher est découvrir le sens premier de l'être, on ne philosophe donc pas en quittant la situation humaine : il faut, au contraire, s'y enfoncer. Le savoir absolu du philosophe est la perception.
Il ne faut donc pas se demander si nous percevons vraiment un monde, il faut dire au contraire : le monde est cela que nous percevons.
La religion fait partie de la culture, non comme dogme, ni même comme croyance, comme cri.
L'interrogation de la peinture vise en tous cas cette genèse secrète et fiévreuse des choses dans notre corps.
Comme la nervure porte la feuille du dedans, du fond de sa chair, les idées sont la texture de l'expérience...
C'est Matisse qui nous a appris à voir les contours, non pas à la manière "psycho-optique", mais comme des nervures, comme les axes d'un système d'activités et de passivités charnelles.
La science manipule des choses et renonce à les habiter.
Ce qui n'est que vécu est ambivalent ; il y a en moi ... des bonheurs faux où je ne suis pas tout entier.
La conscience mytique ou onirique, la folie, la perception dans leur différence ne sont pas fermées sur elles-mêmes, ne sont pas des îlots d'expérience sans communication.
Chaque objet est le miroir de tous les autres.
Le monde est affectivement neutre.
La méditation de la mort est hypocrite puisque c'est une manière morose de vivre.
La vraie philosophie est de rapprendre à voir le monde, et en ce sens une histoire racontée peut signifier le monde avec autant de profondeur qu'un traité de philosophie.
Chaque création change, altère, éclaire, approfondit, confirme, exalte, recrée ou crée d'avance toutes les autres.
L'énigme tient en ceci que mon corps est à la fois voyant et visible.
Si les créations ne sont pas un acquis, ce n'est pas seulement que, comme toutes choses, elles passent, c'est aussi qu'elles ont presque toute leur vie devant elles.
Philosopher, c'est chercher, c'est impliquer qu'il y a des choses à voir et à dire. Or, aujourd'hui, on ne cherche guère. On "revient" à l'une ou l'autre des traditions, on la "défend".
Lumière, éclairage, ombres, reflets, couleur, tous ces objets de la recherche ne sont pas tout à fait des êtres réels : ils n'ont comme les fantômes, d'existence que visuelle.
La philosophie n'est pas une illusion : elle est l'algèbre de l'histoire.
La perception n'est pas une science du monde, ce n'est pas même un acte, une prise de position délibérée, elle est le fond sur lequel tous les actes se détachent et elle est présupposée par eux.
La pensée n'est rien d'intérieur, elle n'existe pas hors du monde et hors des mots.
Le langage réalise, en brisant le silence, ce que le silence voulait et n'altérait pas.
L'homme "sain" n'est pas tant celui qui a éliminé de lui-même les contradictions : c'est celui qui les utilise et les entraîne dans son travail.
Chercher l'essence du monde, ce n'est pas chercher ce qu'il est en idée, une fois que nous l'avons réduit en thème de discours, c'est chercher ce qu'il est en fait pour nous avant toute thématisation.
Pour être tout à fait homme, il faut être un peu plus et un peu moins qu'homme.
La phénoménologie, c'est d'abord le désaveu de la science.
Le cogito nous enseigne que l'existence de la conscience se confond avec la conscience d'exister.
La parole chez celui qui parle ne traduit pas une pensée déjà faite, mais l'accomplit.
Il n'y a pas de psychologie physiologique autonome parce que l'événement physiologique lui-même obéit à des lois biologiques et psychologiques.
Le philosophe se reconnaît à ce qu'il a inséparablement le goût de l'évidence et le sens de l'ambiguïté.
Dire, ce n'est pas mettre un mot sous chaque pensée : si nous le faisions, rien ne serait jamais dit.
Il n'y a dans le visible que des ruines de l'esprit.
La grandeur apparente d'un objet varie avec sa distance apparente, ou sa couleur apparente avec les souvenirs que nous en avons.
On ne peut être juste tout seul, à l'être tout seul on cesse de l'être.
Ne disons plus que le temps est une donnée de la conscience, disons plus précisément que la conscience déploie ou constitue le temps. Par l'idéalité du temps, elle cesse enfin d'être enfermée dans le présent.
Son concept de Nature n'est souvent qu'une idole à laquelle le savant sacrifie plus en raison de motifs affectifs que de données scientifiques.