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Je te parle d'après. De ma vie d'après. Tu étais la preuve que tout est possible. Une sorte de boussole, qui indiquerait un cinquième point cardinal, quelque part du côté des étoiles.
Michel Bussi
Les innocents ? Je connais la justice de ce pays, ma chérie. Un innocent est un coupable qui a un bon avocat.
Je crois que le jardin secret des hommes représente la plus ultime des terres à explorer.
On ne passe sur Terre, au fond, que pour quelques instants d'euphorie.
La vraie tristesse, ça ne se crie pas sur les toits. Le malheur, c'est contagieux !
Même les pires souvenirs finissent par s'oublier, si on en empile d'autres par-dessus, beaucoup d'autres. Même ceux qui vous ont cisaillé le coeur, ceux qui vous ont rayé le cerveau, même les plus intimes. Surtout les plus intimes.
Elle joue sa rose embocalée, comme celle du Petit Prince. Droite, fière et vexée. Toutes épines dehors. Ma mère est une fleur terriblement orgueilleuse.
Longtemps, les deux bols restèrent là, glacés, à peine entamés, sans une ride, stupides, figés par cette seconde qui empailla la vie dans cette petite maison de pêcheurs de la rue Pocholle.
Elle n'avait pas besoin de club de gym ou de piscine pour entretenir sa silhouette, elle était juste le résultat d'un parfait entrainement quotidien... Une maman saine dans un corps sain ! Poussage de Caddie chargé à bloc, sprint jusqu'à l'école, flexion-extension devant le lave-vaisselle, le lave-linge, le sèche-linge... A fond la forme !
Longtemps je n'ai pas eu de chance. À force que le hasard retombe toujours du même côté, jamais du mien, j'en suis venu à imaginer la vie comme une sorte de gigantesque conspiration, uniquement composée de membres ayant prêté serment de se liguer contre moi.
Car si l'eau et le feu, les racines des arbres et les ailes du vent sont capables de venir à bout des plus grandes murailles, de lézarder les tours génoises et de fissurer les ponts de pierre au-dessus des torrents, qu'ont-ils à faire de ces traits tracés au stylo sur du papier ? La nature se fout bien du patrimoine qu'on prétend protéger en son nom.
Elle adorait ces hommes timides, réservés, mais qu'on devine consumés d'une passion intérieur. Le charme slave, du moins, c'est ainsi qu'elle imaginait les hommes de l'Est, ceux aux destins tragiques des romans de Tolstoï ou des pièces de Tchekhov.
Ils pensaient qu'il ne faut pas tourner le dos à la chance lorsqu'elle sourit enfin. Ils auraient dû se méfier, il faut toujours se méfier des sourires.
La beauté, c'est un secret. En parler, c'est la violer. Pour moi, la Corse, c'est ça... Il faut l'aimer et la laisser en paix.
Est-ce un leurre, cette certitude quasi instantanée que celui qui se tient devant vous, vous deviez le rencontrer, que vous ne serez heureuse qu'avec lui et avec personne d'autre, que seuls ses bras peuvent vous protéger, que seule sa voix peut vous faire vibrer, que seul son rire pourra vous faire tout oublier ?
Quand on enterre un être, combien d'amours secrètes enterre-t-on avec ?
Les chansons servent à ça, se disait-elle, même les plus idiotes, à se souvenir des émotions toutes bêtes. Et entendre ton rire s'envoler aussi haut que s'envolent les cris des oiseaux. Ces paroles et d'autres de la même chanson, les derniers mots avant les dernières notes de piano, quand Renaud dit que le temps est assassin et emporte avec lui les rires des enfants. Des vérités toutes bêtes.
Un arc-en-ciel dans le coeur. Cette image de pluie et de soleil mélangés.
Le destin est comme les gamins dans la cour de récré, il s'acharne sur les plus faibles.
Est-ce pour cela qu'ils font tant d'enfants, les pauvres ? Pour multiplier les chances de tomber sur le numéro gagnant ?
Les histoires d'amour finissent mal, pensa stupidement Bastinet. En général.
Je fredonne rien que pour moi le mantra de Tao, devenu un hymne par le miracle de la mélodie d'Higelin. Vivez heureux aujourd'hui, demain il sera trop tard.
Le bonheur, c'est simple, il suffit d'y croire ! Les vacances servent à ça, le ciel sans nuage, la mer, le soleil. À y croire. À faire le plein d'illusions pour le reste de l'année.
Il y a tellement de rêveurs qui naissent dans chaque coin de la planète, des milliards de rêveurs, et tellement peu d'élus...
La fille chargée du RSA, au département, lui a demandé quel travail il cherchait, ses aptitudes, ses projets d'insertion, genre bilan de compétences. Il a expliqué qu'il savait parler aux vagues, les reconnaître, les apprivoiser pour ainsi dire. Il a aussi demandé sérieusement à la fille quel métier on pouvait faire avec ça. Un boulot dans la recherche peut-être ? Ou la culture ?
Comme s'il fallait vieillir pour apprécier le temps qui passe, s'imposer une semaine de régime pour mieux apprécier un bon repas. Se priver pour mériter le plaisir. Vieille morale judéo-chrétienne. Ou musulmane, ou bouddhiste.
Cette île est une terrasse posée sur le rebord du monde pour observer l'avenir du genre humain. À l'ombre, en tongs, un verre de punch à la main.
Il n'avait pas inventé l'eau chaude, ce qui aurait été rudement utile sur la plage de Dieppe.
De la tour du moulin, au quatrième étage, derrière la fenêtre, on peut beaucoup mieux y observer tout ce qui se passe aux alentours. Et beaucoup plus discrètement.
Il avait l'allure d'un flic au bord de la retraite depuis toujours, comme sorti tout droit d'un film d'Olivier Marchal. Le blouson ouvert sur un torse large et un ventre épais. Une gueule surtout. Des cheveux gris mi-longs, raides, tirés à l'arrière jusqu'au bas du cou, libérant un grand front plissé de rides. Genre Marlon Brando sur la fin.
Quand les chauves meurent, les regrets en font des têtes bouclées.
Chaque rayon de soleil au croisement de deux rues me donne envie de chercher un coin d'ombre pour l'aimer, chaque fontaine de pierre de l'éclabousser, chaque porte cochère de nous y cacher.
Les rencontres naissent de coïncidences, continuait-il de penser. D'un jet de dés. Si des couples tiennent ainsi, après que le hasard les a réunis, c'est donc que cela aurait pu tout autant marcher avec une autre fille, si le destin l'avait décidé. C'est donc qu'une histoire d'amour ne vaut pas plus qu'une autre, que mille autres vies auraient été possibles, peut-être meilleures, peut-être pires.
Il plongea dans les vagues bleues des lettres, des mots, des lignes, comme on plonge en apnée dans un océan de doutes.
Quand on veut naviguer sans efforts, en se laissant simplement porter par le courant, il faut au moins sentir d'où souffle le vent.
Tout ce que vous faites avec vos gosses pendant les soixante premiers mois de leur vie, les emmener au zoo, à la mer, leur raconter des histoires, fêter leur anniversaire ou Noël, vous vous en souviendrez avec émotion, toute votre vie, comme si c'était hier, alors que pour eux, pschitt... le néant !
Tu devrais le savoir, maman, c'est tout de même à cause de ton cocon que je suis resté une larve, c'est tout de même à cause de ton ombre que je me suis fané si tôt.
Nous sommes responsables des poids que nous plaçons sur la balance.
Tenez, imaginez une association qui s'occupe des pauvres. Eh bien, le paradoxe c'est que si le nombre de pauvres baisse, la raison d'être de l'association diminue. En d'autres termes, mieux elle travaille et plus elle se saborde. Pareil pour une fondation qui milite contre la guerre. La paix, pour elle signifierait sa mort
En réalité, on peut plutôt considérer que Lautrec et Monet firent le choix de deux destins opposés. Pour Toulouse Lautrec, une vie éphémère de débauche à traquer la luxure de l'âme humaine ; pour Monet, une longue vie contemplative vouée à la nature
Lautrec est aux Albigeois ce que Monet est aux Normands.
Les gosses aiment bien écouter les adultes qui parlent peu. Ils doivent partager avec eux la même pudeur.
On croit toujours que les cocus sont les perdants, mais non, ce sont pour eux que les amants acceptent de mentir, de souffrir, de se cacher, de se quitter. Ce sont eux les seigneurs, les vainqueurs, drapés dans leur honneur, face aux pitoyables menteurs.
Le moindre chagrin d'amour fait plus souffrir que le pire des cataclysmes. Que le monde peut bien s'arrêter de tourner, la Troisième Guerre Mondiale éclater, la terre se réchauffer de dix degrés, rien ne compte d'autre que la vitesse à laquelle bat notre coeur. Et l'heure où il s'arrête, parce qu'une femme, une seule, décide nous quitter...
Dans les films, les hommes amoureux s'arrachent des bras de celle qu'ils n'aiment pas et se précipitent dans ceux de l'autre, et tout le monde n'attend que ça, tout le monde lui pardonne, personne n'a la moindre considération pour la femme officielle délaissée. Dans les films, tout le monde se range du côté du coeur, se fout de la raison.
C'est de là que naissent toutes les haines du monde, lieutenant, toutes les guerres, il nous faut trouver des coupables, toujours, à tous les malheurs de l'univers. Même quand il n'y en a pas, notre esprit les invente.
Les douleurs ne s'additionnent pas, elles se superposent, c'est une grande chance.
Peut-on effacer la mémoire d'un enfant ? Enfouir un traumatisme ? L'empêcher de grossir, de faire racines, de ronger une vie ? Pourquoi pas, après tout.
Je n'avais presque jamais tenu un bébé entre mes bras, mais je comprenais les pères, capables de rester des nuits à porter un enfant contre leur sein. Je comprenais cet incroyable sentiment de responsabilité qui imposait de ne rien faire, d'attendre, statufié pour l'éternité. Qu'être là suffisait.
Dans un groupe qui se constitue, il faut inventer des codes, des références communes, des expressions, des surnoms, des anecdotes à partager, afin que le groupe se soude et qu'une complicité se crée entre les membres.