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La vie doit être elle-même à soi, sa visée.
Michel de Montaigne
C'est de quoi j'ai le plus de peur que la peur.
Le pis que je trouve en notre état, c'est l'instabilité, et que nos lois, non plus que nos vêtements, ne peuvent prendre aucune forme arrêtée.
Le sage vit tant qu'il doit, non pas tant qu'il peut ; et le présent que nature nous ait fait le plus favorable, et qui nous ôte tout moyen de nous plaindre de notre condition, c'est de nous avoir laissé la clef des champs.
Le philosophe Chrysippus mêlait à ses livres, non les passages seulement, mais des ouvrages entiers d'autres auteurs... Si j'étoffais l'un de mes discours de ces riches dépouilles, il éclairerait par trop la bêtise des autres.
Il n'est rien sujet à plus continuelle agitation que les lois.
Les médecins ne se contentent point d'avoir la maladie en gouvernement, ils rendent la santé malade, pour garder qu'on ne puisse en aucune saison échapper leur autorité.
On construit des maisons de fous pour faire croire à ceux qui n'y sont pas enfermés qu'ils ont encore la raison.
Les terres fertiles font les esprits infertiles.
Je ne démonte pas volontiers quand je suis à cheval, car c'est l'assiette en laquelle je me trouve le mieux...
Nous avons une âme contournable en soi-même ; elle se peut faire compagnie elle a de quoi assaillir et de quoi défendre, de quoi recevoir et de quoi donner ; ne craignons pas en cette solitude nous croupir d'oisiveté ennuyeuse.
La force de tout conseil gît au temps ; les occasions et les matières roulent et changent sans cesse.
Notre parler a ses faiblesses et ses défauts, comme tout le reste. La plupart des occasions des troubles du monde sont Grammairiennes. Nos procès ne naissent que du débat de l'interprétation des lois ; et la plupart des guerres, de cette impuissance de n'avoir su clairement exprimer les conventions et traités d'accord des princes.
Votre mort est une des pièces de l'ordre de l'univers ; c'est une pièce de la vie du monde.
Je réponds ordinairement à ceux qui me demandent raison de mes voyages : que je sais bien ce que je fuis, mais non pas ce que je cherche.
Si j'avais à revivre, je revivrais comme j'ai vécu ; ni je ne plains le passé, ni je ne crains l'avenir.
Le jambon fait boire Or, le boire désaltère Donc, le jambon désaltère.
L'une des plus grandes sagesses de l'art militaire, c'est de ne pas pousser son ennemi au désespoir.
... l'avarice ... cette maladie si commune aux vieux et la plus ridicule de toutes les humaines folies.
Il faut que notre conscience s'amende d'elle-même par renforcement de notre raison, non par l'affaiblissement de nos appétits.
Les miracles sont selon l'ignorance en quoi nous sommes de la nature, non selon l'être de la nature.
Nos connaissances ne résistent pas à l'examen, toutes sont douteuses, et celles qui semblent moins incertaines, nous ne les trouvons pas par le raisonnement.
Si on cache une région du corps, c'est pour mieux attirer l'attention sur elle.
Je n'ai point cette erreur commune de juger d'un autre selon que je suis. J'en crois aisément des choses diverses à moi.
Nous ne devenons pas autres pour mourir. J'interprète toujours la mort par la vie.
L'amitié, c'est une chaleur générale et universelle, tempérée, au demeurant, et égale.
La plus constante marque de la sagesse, c'est une constante réjouissance.
Il n'est temps de regimber quand on s'est laissé entraver.
Ainsi sur tout il se faut garder, qui peut, de tomber entre les mains d'un juge ennemi, victorieux et armé.
Qui ne contre-change volontiers la santé, le repos et la vie, à la réputation et à la gloire, la plus inutile, vaine et fausse monnaie, qui soit en notre usage ?
Et de combien est le langage faux moins sociable que le silence.
Qui a pris de l'entendement en la logique ? où sont ses belles promesses ?
Mon apprentissage n'a d'autre fruit que de me faire sentir combien il me reste à apprendre.
Tous jugements en gros sont lâches et imparfaits.
Personne n'est exempt de dire des fadaises. Le malheur est de les dire curieusement.
Toute opinion est assez forte pour se faire épouser au prix de sa vie.
Je ne trouve rien si cher que ce qui m'est donné.
Ils envoient leur conscience au bordel et tiennent leur contenance en règle.
Mais nous ne dirons jamais assez d'injures au dérèglement de notre esprit.
La nature n'a que faire d'un grand destin pour se montrer et déployer sa force. Partout, dissimulée ou au grand jour, elle se manifeste avec la même intensité.
On se peut, par usage et par expérience, fortifier contre les douleurs, la honte, l'indigence et tels autres accidents ; mais, quant à la mort, nous ne la pouvons essayer qu'une fois ; nous y sommes tous apprentis quand nous y venons.
... il fait beau d'apprendre la théorique de ceux qui savent bien la pratique.
Qui songe à oublier se souvient.
Je pense avoir les opinions bonnes et saines ; mais qui n'en croit autant des siennes ? L'une des meilleures preuves que j'en aie, c'est le peu d'estime que je fais de moi.
Mieux vaut laisser son enfant morveux que de lui arracher le nez.
C'est un bon peuple guerrier et généreux, capable pourtant d'obéissance et discipline, et de servir à quelque bon usage, s'il y est bien guidé.
Il faut rejeter toujours l'architecte, le peintre, le cordonnier, et ainsi du reste, chacun à son gibier.
Je ne pense point qu'il y ait tant de malheur en nous comme il y a de vanité, ni tant de malice comme de sottise ; nous ne sommes pas si pleins de mal comme d'inanité ; nous ne sommes pas si misérables comme nous sommes vils.
Je ne cherche aux livres qu'à m'y donner du plaisir par un honnête amusement ; ou si j'étudie, je n'y cherche que la science qui traite de la connaissance de moi-même, et qui m'instruise à bien mourir et à bien vivre.
Ne faites donc pas comme l'avare, qui perd beaucoup pour ne vouloir rien perdre.