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Il suffit à un homme enchaîné de fermer les yeux pour qu'il ait le pouvoir de faire éclater le monde.
Octavio Paz
Chaque nuit est une paupière que les épines n'arrivent pas à traverser.
La création poétique est d'abord violence faite au langage, son premier acte est de déraciner les mots.
Les hommes se servent des mots ; le poète les sert.
Les apparences sont belles dans leur vérité momentanée.
La solitude est le fond ultime de la condition humaine. L'homme est l'unique être qui se sente seul et qui cherche l'autre.
Un épi est tout le blé.
Mes yeux te tiennent suspendue comme la lune la marée embrasée. A tes pieds l'écume égorgée chante le chant de la nuit qui commence.
Je me baignais dans la cascade solaire. Je me baignais en moi-même, noyée dans ma propre splendeur. J'étais le silex qui, dans la nuit, dégage les cols de l'orage.
L'imagination religieuse avait conçu un Dieu supérieur à ses créatures ; l'imagination technique a conçu un Dieu-ingénieur, inférieur à ses inventions.
Note sereine, qui avance par un pays de neige et d'ailes, entre des précipices et des cimes où les astres aiguisent leurs couteaux, et que seul accompagne un murmure grave de traîne veloutée - où te diriges-tu ?
Il y a un aquarium d'yeux dans ton alcôve.
Dans la nuit des paroles égorgées, mes soeurs et moi, nous tenant la main, nous sautons et chantons autour du I, seule tour restée debout dans l'alphabet rasé.
Savoir parler a toujours été savoir se taire, savoir qu'il ne faut pas toujours parler.
Parfois une lueur vivace croise l'obscurité, un coup d'aile vert, écaillé. C'est le Cri, qui sort un moment dans l'air, respire et plonge à nouveau dans les profondeurs.
L'eau parle sans cesse et jamais ne se répète.
Dès l'aube ce qui naît cherche son nom.
Nommer, c'est créer, et imaginer, c'est naître.
Je suis la blessure qui ne se cicatrise pas, la petite pierre solaire : si tu me frôles, le monde s'incendiera.
Dieu qui sort d'une orchidée en terre Entre les pétales d'argile naît souriante la fleur humaine.
Le déclin de la notion de personne est le facteur premier des désastres politiques du XXe siècle et de l'avilissement général de notre civilisation.
Attends-moi de l'autre côté de l'année : tu me rencontreras comme un éclair étendu au bord de l'automne.
Je dégorge toutes les paroles, tous les credo, tous ces aliments froids dont ils nous ont gavés depuis le début.
Le tonnerre proclame les hauts faits de l'éclair.
Je me replie. Je rentre en moi par mon oreille gauche. Mes pas retombent dans la solitude de mon crâne qu'illumine seule une constellation grenat. Je parcours à tâtons l'énorme salle démantelée. Portes murées, fenêtres condamnées.
Je me relève : il est à peine une heure. Je m'allonge, mes pieds sortent de la chambre, ma tête perfore les murs. Je m'étends dans l'immensité comme les racines d'un arbre sacré, comme la musique, comme la mer.
Toute oeuvre d'art est une possibilité permanente de métamorphose, offerte à tous les hommes.
L'arbre endormi profère des oracles verts.
Adolescence féroce : l'homme qui veut être et qui ne tient déjà plus dans ce corps étroit, étrangle l'enfant que nous sommes.
J'écoute les pas étouffés de l'aurore qui s'insinue par les fentes, fille maigre et perverse qui jette une lettre pleine d'insinuations et de calomnies.
L'amour est choix ; l'érotisme, acceptation.
Toute culture naît du mélange, de la rencontre, des chocs. A l'inverse, c'est de l'isolement que meurent les civilisations.
Sa bouche est un pigeonnier d'où jaillissent des mots insensés, sources étonnées de sourdre, blancheurs abasourdies d'être.
L'encre noire ouvre ses larges ailes. Mais la lampe éclate et couvre mes mots d'une couche de cristaux brisés.
Les corps sont des hiéroglyphes sensibles.
Le baume qui cicatrise la blessure du temps se nomme religion ; le savoir qui nous amène à vivre avec notre blessure se nomme philosophie.
Par la parole, l'homme est une métaphore de lui-même.
C'est toujours maintenant et à chaque heure toujours.
Sur le cou d'oiseau de la nuit, tu es un collier de soleil.
Le feu de l'enfer est un feu froid.
Le fou écarte les barreaux de l'espace et saute en lui-même. Il disparaît d'emblée en s'avalant.
Je fais mourir de faim l'amour pour qu'il dévore ce qu'il trouve.
Je remplis de sable la bouche des exclamations.
Je suis une arène où je me jette sur des capes illusoires que me présentent des toreros endeuillés. Don Tancredo se dresse au centre de l'arène, immobile, éclair de craie.
Il n'y a pas de moi, toujours nous sommes nous autres. La vie est autre, toujours là-bas, plus loin, hors de toi, de moi, toujours horizon.
Viens, mon amour, viens cueillir les éclairs dans le jardin nocturne. Prends ce bouquet d'étincelles bleues, viens avec moi arracher quelques heures incandescentes à ce bloc de temps pétrifié, unique héritage que nous laissèrent nos parents.
Château d'une seule masse, irréfutable proposition de lave ! A l'intérieur, est-ce amour, carnage ou chant ?
Le plaisir est instantané parce que l'homme résiste mieux au temps qu'à l'éternité.
Le temps souffre d'un besoin d'incarnation.
L'heure est boule de cristal.