Images
Et toi, maison brûlante, Espace, cher Espace - Tranquille, où l'arbre fume et perd quelques oiseaux, ...
Paul Valéry
Mais rendre la lumière suppose d'ombre une morne moitié.
Il est une chose paradoxale qui semble répondre à l'évidence qui proclame : Ce qui ne sert à rien ne vaut rien, par une déclaration péremptoire toute contraire : Je ne sers à rien et je vaux plus que tout.
Le châtiment déprime la moralité car il donne au crime une compensation finie.
Une oeuvre d'art devrait toujours nous apprendre que nous n'avions pas vu ce que nous voyons.
Sans doute, des divergences peuvent se manifester entre les interprétations poétiques d'un poème, entre les impressions et les significations ou plutôt entre les résonances que provoque, chez l'un ou chez l'autre, l'action de l'ouvrage.
Pas d'insensibilité aux compliments. Nul n'y échappe, hormis l'homme souffrant. La plante humaine semble s'épanouir sous les louanges.
Il fallait être Newton pour apercevoir que la lune tombe, quand tout le monde voit bien qu'elle ne tombe pas.
La mort enlève tout sérieux à la vie. C'est pourquoi les religions ont cru devoir faire de la mort une espèce d'acte, quelque chose comme un mariage ou un examen, et ont ajouté une vie fiduciaire subséquente à la vie.
D'autres peuplades essayent d'exploiter les esprits, d'obtenir leur assistance ou leur faveur dans les travaux agricoles ou bien dans les entreprises de chasse ou de pêche. On s'efforce parfois de leur tirer quelques oracles.
Les plus grands hommes sont des hommes qui ont osé se fier à leurs jugements propres, - et pareillement les plus sots.
Le réel, à l'état pur, arrête instantanément le coeur.
Autorisation de se tuer, seulement au parfaitement heureux.
Quand on célèbre la "pensée" on célèbre un très petit nombre de produits d'un très petit nombre d'êtres.
Idéal d'une âme. - Le désir d'avoir une âme et de n'être immortellement que cette âme, ce désir doit pâlir singulièrement près du désir d'une âme d'avoir un corps, et une durée. Elle céderait son royaume même pour un cheval. Un âne, peut-être ?
Tendresse est tendance à se livrer en toute faiblesse à la douceur d'être faible. Mais d'où vient ce "plaisir" ? Cette faiblesse, il est vrai, cet attendrissement - prépare un coup d'extrême force.
Le diplôme est l'ennemi mortel de la culture.
Notre insuffisance d'esprit est précisément le domaine des puissances du hasard, des dieux et du destin.
La vanité, grande ennemie de l'égoïsme, peut engendrer tous les effets de l'amour du prochain.
En somme, tout pouvoir est exactement dans la situation d'un établissement de crédit dont l'existence repose sur la seule probabilité (d'ailleurs très grande), que tous les clients à la fois ne viendront pas le même jour réclamer leurs dépôts.
Le très grand art est celui dont les imitations sont légitimes, dignes, supportables ; et qui n'est pas détruit ni déprécié par elles ; ni elles par lui.
Et notre économie hésite à chaque instant entre un développement illimité de la symbolique des échanges, et un retour tout à fait inattendu au système primitif, au système des sauvages, au troc.
Tout classicisme suppose un romantisme antérieur... - L'ordre suppose un certain désordre qu'il vient réduire.
Durer provient de dur.
Le pauvre est le produit d'une transformation facile effectuée sur le riche ; le riche, celui d´une transformation difficile effectuée sur le pauvre.
Trouver n'est rien. Le difficile est de s'ajouter ce qu'on trouve.
L'éducation ne se borne pas à l'enfance et à l'adolescence. L'enseignement ne se limite pas à l'école. Toute la vie, notre milieu est notre éducation, et un éducateur à la fois sévère et dangereux.
Les injures font voir dans l'injurieux une mince confiance dans l'avenir.
Le seul don du destin aux hommes, c'est la mort.
Le rêve est une veille d'où les forces sont absentes. Adynamie illustrée.
L'esprit clair fait comprendre ce qu'il ne comprend pas.
Il n'y a d'universel que ce qui est suffisamment grossier pour l'être.
L'univers est construit sur un plan dont la symétrie profonde est en quelque sorte, présente dans l'intime structure de notre esprit.
Un livre n'est après tout qu'un extrait du monologue de son auteur. L'homme ou l'âme se parle ; l'auteur choisit dans ce discours.
Chacun dissimule quelque chose à quelqu'un, et chacun, quelque chose à soi-même. Il y a donc deux versants de sincérité.
On ne pense réellement à soi et l'on est soi que quand on ne pense à rien.
Qui pleure là, sinon le vent simple, à cette heure - Seule, avec diamants extrêmes ? Mais qui pleure, - Si proche de moi-même au moment de pleurer ?
Si le chirurgien doit être qualifié d'artiste, c'est que son ouvrage ne se réduit pas à l'exécution uniforme d'un programme d'actes impersonnels.
Si tout le monde a bonne opinion d'une mauvaise affaire, elle est une bonne affaire.
Il faut, un jour d'énergie, prendre le livre que l'on tient pour ennuyeux, lui ordonner d'être, essayer de reconstituer l'intérêt qu'y a pris l'auteur.
L'avenir est la parcelle la plus sensible de l'instant.
Le besoin de nouveau est signe de fatigue ou de faiblesse de l'esprit, qui demande ce qui lui manque. Car il n'est rien qui ne soit nouveau.
La mode étant l'imitation de qui veut se distinguer par celui qui ne veut pas être distingué, il en résulte qu'elle change automatiquement. Mais le marchand règle cette pendule.
Le vent se lève ! Il faut tenter de vivre !
Est prose l'écrit qui a un but exprimable par un autre écrit.
Celui même qui veut écrire son rêve se doit d'être infiniment éveillé.
Le monde, qui baptise du nom de progrès sa tendance à une précision fatale, cherche à unir aux bienfaits de la vie les avantages de la mort.
Il ne manque point de personnes, et doctes, et bénignes, et bien disposées, qui attendent pour me lire que l'on m'ait traduit en français.
Une oeuvre dure en tant qu'elle est capable de paraître tout autre que son auteur l'avait faite.
C'est là véritablement traduire, qui est de reconstituer au plus près l'effet d'une certaine cause, - ici un texte de langue espagnole au moyen d'une autre cause, - un texte de langue française.