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Nous étions des bêtes. Qui sentait et criait ? La bête qui est dans l'homme, la bête dont vit l'homme. La bête qui fait l'amour et la guerre et la révolution.
Pierre Drieu la Rochelle
La vie n'allait pas assez vite en moi, je l'accélère. La courbe mollissait, je la redresse. Je suis un homme. Je suis maître de ma peau, je le prouve. Un revolver, c'est solide, c'est en acier. C'est un objet. Se heurter enfin à l'objet.
C'est très laid les scrupules. C'est ce qui défigure le criminel.
A vingt-deux ans, peu déniaisé, retenu par des timidités ou des dégoûts, militaire depuis longtemps, ne connaissant guère que le bordel, j'avais le sentiment de mon infériorité comme amant, ce qui se paye.
Les Allemands sont des cons ; moi aussi ; je veux mourir avec eux.
Lorsqu'on couche longtemps avec une femme mariée, il y a toujours un moment où l'on est pour le mari.
Je m'avançais, débraillé, sans armes ... me dandinant parmi mes camarades qui pliaient sous leur arroi.
Je reçus pour cette soirée une invitation qui me venait d'un ancien camarade, devenu gros bonnet dans le commerce des visons. Je me décidai à en profiter.
Les dieux naissent avec les hommes, meurent avec les hommes, mais ces races emmêlées roulent dans l'éternel.
La littérature n'est qu'une forme édulcorée de la confession.
Le XXe siècle ne finira pas sans avoir vu d'étranges réconciliations.
L'art, en donnant du prix aux sensations, offre aux hommes leur seule chance de réaliser la vie.
Claudel est le seul écrivain vraiment sain depuis le Moyen Age, qui soit aussi vraiment grand. Etrange et miraculeux réveil des forces dans cette France exténuée.
Ceux qui agissent, bâtissent et dépensent profitent des trésors accumulés par ceux qui rêvent, qui prient et qui amassent.
On peut dire qu'il n'y a pas un seul chrétien en France depuis Pascal jusqu'à Léon Bloy, surtout pas dans l'Eglise.
Nous nous égaillions par groupes dans les taillis et nous saccagions, après tant d'autres trésors, le trésor sylvestre du pays.
Par exemple, toutes les femmes qui sont ici, je ne peux pas les désirer, elles me font peur, peur. J'ai aussi peur devant les femmes qu'au front pendant la guerre.
Nous nous reconnaissions comme des braves, comme de ceux qui sont le sel d'une armée. Et chacun devenait encore plus brave en regardant l'autre.
Je n'ai jamais vu la dignité de l'homme que dans la sincérité de ses passions.
L'extrême civilisation engendre l'extrême barbarie.
La confession la plus circonstanciée n'épuise jamais le contenu essentiel d'un homme et il vaut mieux franchement renoncer à dire beaucoup que de prétendre avoir tout dit parce qu'on a révélé tous les faits.
Et ils sont mal ficelés. L'un perd sa cravate, l'autre sa molletière.
Elle semblait, toujours satisfaite de ces audiences médiocres, ignorer qu'il aurait pu y en avoir d'autres un peu plus difficiles.
La décadence, toujours la décadence... La vie est une perpétuelle décadence depuis le début.
Pendant tout ce temps, j'oscillais entre mon nationalisme théorique d'avant l'armée et ma pratique de défilage, de lâchage.
Les volontaires, en ce début de guerre - et sans doute, à la fin y en aurait-il encore - se poussaient comme une queue au théâtre. Beaucoup étaient appelés, peu d'élus.
Il regrettait les soirées de Paris, ce moment délicieux de sept heures du soir, quand on est libre et qu'on peut choisir entre mille plaisirs et que l'ivresse s'offre comme une compagne folle et bavarde.
Il me semble que si j'arrivais à tuer tout à fait le désir de possession que je refoule si péniblement, je nierais mon amour.
La mort violente est le fondement de la civilisation, du contrat social, de n'importe quel pacte. C'est la seule certitude.
Que soit bénie la foi des hommes qui osent renouveler la figure du monde selon l'idéal qu'ils chérissent.
Un objet, un meuble, ne peut être viable et durable que s'il naît à la manière des hommes. Il doit être conçu comme un enfant.
Il paraît qu'à Liège les Allemands ont employé une arme nouvelle, un hélicoptère qui descend perpendiculairement des charges de bombes sur les ouvrages.
Nous saurons qui nous sommes quand nous verrons ce que nous avons fait.
J'aime trop l'amour pour beaucoup apprécier l'amitié.
Les Allemands séduits par la facilité se remettaient à tirer. Et comment. Quelle dégelée de balles. C'est si facile de déchirer un centimètre de chair avec une tonne d'acier.
Il avait fait des pieds et des mains pour obtenir une bonne chambre et je le trouvai en train de donner de largent à un camarade qu'il délogeait.
Ils voient que je suis bourgeois jusqu'au bout des ongles et pourtant homme.
On nous criaille de derrière qu'il faut avancer et se déployer. Mais on reste ployé.
On parle de la guerre. Nous nous rendons compte qu'on nous a encore une fois bourré le crâne.
La vie est aux passionnés, aux démesurés.
Bientôt ils revinrent à leur tanière amochée.
L'idée de patrie est liée à l'idée de guerre. Etant donné ce qu'est devenue la guerre dans le monde actuel, elle fait de la Patrie la force la plus immédiatement dangereuse qui circule au milieu de nous.
Nos parents ne nous donnent pas plus que les animaux à leurs petits. Ils nous mettent au monde avec leur péché et ils ne s'inquiètent guère de notre rédemption.
Ces balles, c'est du minerai, sorti des entrailles de la terre, qui vous jaillit à la figure. Et c'est conjointement une convulsion de cette société.
Les Allemands, du point de vue de la vitalité élémentaire, du dynamisme brutal, sont déclassés par les Russes comme nous le sommes par eux.
... Sans dieux ni maîtres, ceux-là étant morts, ceux-ci n'étant pas encore nés, nous n'avons que notre jeunesse.
Le suicide c'est la ressource des hommes dont le ressort a été rongé par la rouille.
Le drame de l'amitié entre les hommes, c'est tout le coeur de la politique.
"Je vais savoir ce qu'est la mort." Voilà la pensée qui fulgura dans mon cerveau.
Ma forfanterie leur semblait sans avenir. Il y avait quelque chose d'excessif en moi, qui leur annonçait le dégonflement.