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Si l'on ne peut informer l'avenir à l'aide d'une grande bataille, il faut laisser des traces de combat. Les vraies victoires ne se remportent qu'à long terme et le front contre la nuit.
René Char
Au plus fort de l'orage, il y a toujours un oiseau pour nous rassurer. C'est l'oiseau inconnu. Il chante avant de s'envoler.
Il existe une sorte d'homme toujours en avance sur ses excréments.
Nous tombons. Je vous écris en cours de chute. C'est ainsi que j'éprouve l'état d'être au monde.
C'est un étrange sentiment que celui de fixer le destin de certains êtres. Sans votre intervention, la médiocre table tournante de la vie n'aurait pas autrement regimbé. Tandis que les voici livrés à la grande conjoncture pathétique...
Dans nos ténèbres, il n'y a pas une place pour la Beauté. Toute la place est pour la Beauté.
Au seuil de la pesanteur, le poète comme l'araignée construit sa route dans le ciel. En partie caché à lui-même, il apparaît aux autres, dans les rayons de sa ruse inouïe, mortellement visible.
On ne fait pas un lit aux larmes comme à un visiteur de passage.
Dans les rues de la ville, il y a mon amour. Peu importe où il va dans le temps divisé. Il n'est plus mon amour : chacun peut lui parler. Il ne se souvient plus qui, au juste, l'aima Et l'éclaire de loin pour qu'il ne tombe pas !
L'homme fut sûrement le voeu le plus fou des ténèbres ; c'est pourquoi nous sommes ténébreux, envieux et fous sous le puissant soleil.
La poésie ne se laisse pas saisir. Quand elle nous veut, elle est par essence indescriptible.
Imite le moins possible les hommes dans leur énigmatique maladie de faire des noeuds.
Toute respiration propose un règne.
Les larmes méprisent leur confident.
Les boueurs de poésie sont en général privés du sentiment de la poésie ; inaptes à percer les voies de son action. Il faut être l'homme de la pluie et l'enfant du beau temps.
Je ris merveilleusement avec toi. Voilà la chance unique.
Pour qu'un héritage soit réellement grand, il faut que la main du défunt ne se voie pas.
Nous devons surmonter notre rage et notre dégoût, nous devons les faire partager, afin d'élever et d'élargir notre action comme notre morale.
C'est l'enthousiasme qui soulève le poids des années. C'est la supercherie qui relate la fatigue du siècle.
Entre le monde de la réalité et moi, il n'y a plus aujourd'hui d'épaisseur triste.
C'est le peu qui est réellement tout. Le peu occupe une place immense. Il nous accepte indisponibles.
L'hémophilie politique de gens qui se pensent émancipés. Combien sont épris de l'humanité et non de l'homme ! Pour élever la première ils abaissent le second.
A tous les repas pris en commun, nous invitons la liberté à s'asseoir. La place demeure vide, mais le couvert reste mis.
Merveilleux moment que celui où l'homme n'avait nul besoin de silex, de brandons pour appeler le feu à lui mais où le feu surgissait sur ses pas, faisant de cette homme une lumière de toujours et une torche interrogative.
Le réel quelquefois désaltère l'espérance. C'est pourquoi, contre toute attente, l'espérance survit.
Les plus pures récoltes sont semées dans un sol qui n'existe pas. Elles éliminent la gratitude et ne doive qu'au printemps.
Monter, grimper... mais se hisser ? Oh ! Combien c'est difficile. Le coup de reins lumineux, la rasante force qui jaillit de son terrier et, malgré la pesanteur, délivre l'allégresse.
Nous vivons avec quelques arpents de passé, les gais mensonges du présent et la cascade furieuse de l'avenir.
Notre héritage n'est précédé d'aucun testament.
Je vis au fond de lui comme une épave heureuse. A son insu, ma liberté est son trésor ! Dans le grand méridien où s'inscrit son essor, Ma solitude se creuse.
Agir en primitif et prévoir en stratège.
Vivre, c'est s'obstiner à achever un souvenir.
Fureur et mystère tour à tour le séduisirent et le consumèrent. Puis vint l'année qui acheva son agonie de saxifrage.
Une demande comblée c'est un appel qui n'arrive pas à destination.
Comment vivre sans inconnu devant soi ?
Enfonce-toi dans l'inconnu qui creuse. Oblige-toi à tournoyer.
Le poète transforme indifféremment la défaite en victoire, la victoire en défaite, empereur prénatal seulement soucieux du recueil de l'azur.
L'impossible, nous ne l'atteignons pas, mais il nous sert de lanterne.
Tu es dans ton essence constamment poète, constamment au zénith de ton amour, constamment avide de vérité et de justice. C'est sans doute un mal nécessaire que tu ne puisses l'être assidûment dans ta conscience.
J'ai lié les unes aux autres mes convictions et agrandi ta Présence. J'ai octroyé un cours nouveau à mes jours en les adossant à cette force spacieuse.
Ecoute, mais n'entends pas.
La seule signature au bas de la vie blanche, c'est la poésie qui la dessine.
Le poète est la génèse d'un être qui projette et d'un être qui retient. A l'amant, il emprunte le vide ; à la bien-aimée, la lumière.
Celui qui dompte le lion, devient l'esclave du lion. Ce qu'il faut, c'est faire du feu entre lui et toi.
Terre mouvante, horrible, exquise et condition humaine hétérogène se saisissent et se qualifient mutuellement. La poésie se tire de la somme exaltée de leur moire.
L'homme de l'espace dont c'est le jour natal sera un milliard de fois moins lumineux et révélera un milliard de fois moins de choses cachées que l'homme granité, reclus et recouché de Lascaux, au dur membre débourbé de la mort.
Tellement j'ai faim, je dors sous la canicule des preuves.
Enchemisé dans les violences de sa nuit, le corps de notre vie est pointillé d'une infinité de parcelles lumineuses coûteuses. Ah ! quel sérail.
Il faut s'établir à l'extérieur de soi, au bord des larmes et dans l'orbite des famines, si nous voulons que quelque chose hors du commun se produise, qui n'était que pour nous.
Il faut être l'homme de la pluie et l'enfant du beau temps.