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La création est faite du mouvement descendant de la pesanteur, du mouvement ascendant de la grâce et du mouvement descendant de la grâce à la deuxième puissance.
Simone Weil
La création : le bien mis en morceaux et éparpillé à travers le mal. - Le mal est l'illimité, mais il n'est pas l'infini. - Seul l'infini limite l'illimité.
La science, aujourd'hui, cherchera une source d'inspiration au-dessus d'elle ou périra.
L'amour pur est cette force agissante, l'amour qui ne veut à aucun prix, en aucun cas, ni du mensonge ni de l'erreur.
La pureté est le pouvoir de contempler la souillure.
Quand on a péché par injustice, il ne suffit pas de souffrir justement, il faut souffrir l'injustice.
La grande erreur des marxistes et de tout le XIXe siècle a été de croire qu'en marchant tout droit devant soi, on a monté dans les airs.
Une science qui ne nous approche pas de Dieu ne vaut rien. - Mais si elle nous en fait mal approcher, c'est-à-dire d'un Dieu imaginaire, c'est pire...
Ce serait une erreur de croire que la sensibilité à la beauté est le privilège d'un petit nombre de gens cultivés. Au contraire, la beauté est la seule valeur universellement reconnue.
Consentir à ne pas être, c'est consentir à la privation de tout bien, et ce consentement constitue la possession du bien total. Seulement on ne le sait pas. Si on le sait, le bien disparaît.
Nous vivons ici-bas dans un mélange de temps et d'éternité. L'enfer serait du temps pur.
Dieu ne peut être présent dans la création que sous la forme de l'absence.
L'attention, à son plus haut degré, est la même chose que la prière. Elle suppose la foi et l'amour.
Il faut se déraciner. Couper l'arbre et en faire une croix, et ensuite la porter tous les jours.
L'amour est une chose divine. S'il entre dans un coeur humain, il le brise. Le coeur humain a été créé pour être ainsi brisé. C'est le plus triste des gaspillages, quand il est brisé par autre chose.
Le chrétien est un mauvais païen, converti par un mauvais juif.
Les opprimés en révolte n'ont jamais réussi à fonder une société non oppressive.
Aimer purement, c'est consentir à la distance, c'est adorer la distance entre soi et ce qu'on aime.
Nous fuyons le vide intérieur parce que Dieu pourrait s'y glisser.
Et si on conçoit la plénitude de la joie, la souffrance est encore à la joie comme la faim à la nourriture.
Le mot de révolution est un mot pour lequel on tue, pour lequel on meurt, pour lequel on envoie les masses populaires à la mort, mais qui n'a aucun contenu.
Le froid de l'acier est pareillement mortel à la poignée et à la pointe. Tout ce qui est exposé au contact de la force est susceptible de dégradation.
La plénitude de l'amour du prochain, c'est simplement d'être capable de lui demander : Quel est ton tourment ?
Accepter d'être soumis à la nécessité et n'agir qu'en la maniant.
Il est seulement clair, dans l'ensemble, que plus le niveau de la technique est élevé, plus les avantages que peuvent apporter des progrès nouveaux diminuent par rapport aux inconvénients.
Un critérium du réel, c'est que c'est dur et rugueux. On y trouve des joies, non de l'agrément. Ce qui est agréable est rêverie.
Deux prisonniers, dans des cachots voisins, qui communiquent par des coups frappés contre le mur. Le mur est ce qui les sépare, mais aussi ce qui leur permet de communiquer. Ainsi nous et Dieu. Toute séparation est un lien.
Considérer toujours les hommes au pouvoir comme des choses dangereuses.
Le mal est à l'amour ce que le mystère est à l'intelligence.
Dans un poème, si l'on demande pourquoi tel mot est à tel endroit, et s'il y a une réponse, ou bien le poème n'est pas de premier ordre, ou bien le lecteur n'a rien compris.
Le travail physique consenti est, après la mort consentie, la forme la plus parfaite de la vertu d'obéissance.
Etre orgueilleux, c'est oublier qu'on est Dieu...
Le péché contre l'Esprit consiste à connaître une chose comme bonne et à la haïr en tant que bonne.
Mon Dieu, mon Dieu, pourquoi m'as-tu abandonné ? Là est la véritable preuve que le christianisme est quelque chose de divin.
Il n'y a aucune possibilité de satisfaire chez un peuple le besoin de vérité si l'on ne peut trouver à cet effet des hommes qui aiment la vérité.
... l'usage principal de la douleur ... est de m'apprendre que je ne suis rien.
Dans le domaine de l'intelligence, la vertu d'humilité n'est pas autre chose que le pouvoir d'attention.
Toutes les fois qu'on fait vraiment attention, on détruit du mal en soi.
Quiconque prend l'épée périra par l'épée. Mais quiconque ne prend pas l'épée (ou la lâche) périra par la croix.
Il faut éliminer le malheur autant qu'on le peut de la vie sociale, car le malheur ne sert qu'à la grâce et la société n'est pas une société d'élus. Il y aura toujours assez de malheur pour les élus.
Une très belle femme qui regarde son image au miroir peut très bien croire qu'elle est cela. Une femme laide sait qu'elle n'est pas cela.
L'esprit succombant sous le poids de la quantité n'a plus d'autre critérium que l'efficacité.
On meurt pour ce qui est fort, non pour celui qui est faible. Mourir pour ce qui est fort fait perdre à la mort son amertume.
Alexandre (Le Grand) est à un paysan propriétaire ce qu'est don Juan à un mari heureux.
Aimer un étranger comme soi-même implique comme contrepartie : s'aimer soi-même comme un étranger.
Seul est éternel le devoir envers l'être humain comme tel.
Peut-on dire que nous avons apporté la culture aux Arabes, eux qui ont conservé pour nous les traditions grecques pendant le moyen âge ?
Un homme qui serait seul dans l'univers n'aurait aucun droit, mais seulement des obligations.
Tous les mouvements naturels de l'âme sont régis par des lois analogues à celles de la pesanteur matérielle. La grâce seule fait exception. Deux forces règnent sur l'univers : lumière et pesanteur.
La vulnérabilité des choses précieuses est belle parce que la vulnérabilité est une marque d'existence.