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L'Himalaya continue à monter : mais que veut-il de plus que les neiges éternelles ?
Sylvain Tesson
Mettez un caméléon sur un kilt, il deviendra fou.
Voyager, ce n'est pas choisir les ordres, c'est faire entrer l'ordre en soi.
Si le Tibet est le toit du monde, le Népal en est la gouttière.
Ponctuation : les points d'exclamation de la pluie, la virgule des herbes, les points de suspension du brouillard, la parenthèse de midi, le point final du soir, l'alinéa de l'aube.
Marcher sans but est un objectif.
Si les glaciers reculent, la montagne finira par se rendre.
Insomnie : tapage nocturne des pensées.
Est-ce pour avoir regardé ce qui se passait à l'intérieur des maisons que les larmes de la pluie coulent sur la joue des carreaux ?
Comment les écrevisses font-elles pour se rencontrer ?
Préférer les lieux sauvages aux lieux communs.
La becquée aux oisillons : si elle n'y prenait garde, la mère se ferait dévorer.
Le lacet d'un chemin noue la gorge.
Je suis sûr qu'il y a bien des voiles de mariées qui ne demandent qu'à prendre le large.
Un paon crevé de faire la roue.
La végétation est le fard de la Géologie.
L'individualité s'exprime magnifiquement dans le mouvement.
La toile : pensée de l'araignée dont elle ne perd jamais le fil.
Le voyageur sait bien que si la route aide à s'alléger de tous ses biens, elle ne débarrasse pas de ses maux.
Le baiser du vent s'appelle une bise.
La fille de joie est l'enfant du malheur.
La plus grande réussite de l'Empire, c'est que tout un peuple ait compris qu'il pouvait accéder à une folie qui resterait à la postérité.
Les citations révèlent l'âme de celui qui les brandit.
Je ne comprends pas les voyageurs qui usent du monde comme d'un divan, et infligent à la route l'insulte d'en faire la thérapeute de leurs névroses.
Vingt mille kilomètres pour aller chercher l'été : l'impatience des sternes.
Développement durable : supplique à la planète de nous supporter encore un peu.
L'aube est-elle rouge du sang à verser aujourd'hui sur la Terre ou de celui coulé la nuit précédente ?
Quand deux petits chiens vous fêtent au matin, la nuit prend la saveur de l'attente.
Perdre du temps à chercher sa route.
Jeanne d'Arc : tout feu, tout femme.
Guillemot, notre modèle : il plonge, se trempe, reste sec.
Ce capricorne, mort d'un cancer sur le tropique.
Dans les pays pauvres, les pauvres sont maigres, mais dans les pays riches, ils sont gros.
Le rouge de la viande me monte au front quand je pense à la vache.
Neige, la poudre aux yeux de l'hiver.
Comment font certains livres pour rester si tranquilles avec ce qu'ils recèlent ?
Dissimule ta vie, disait Epicure dans l'une de ses maximes (en l'occurrence c'était peu réussi car on se souvenait de lui deux millénaires après sa mort).
La mante mange son mari, la religieuse son Dieu.
Si les asticots nous regardaient vivre, ils seraient écoeurés.
Ne condamnons pas les mauvaises herbes : c'est le terreau qui est propice.
Flocons : l'hiver avance à pas feutrés.
Les trous de mémoire sont une humiliation suprême, pire que les ravages des mites dans la penderie d'une ménagère maniaque.
Les myrtilles sont des grelots que rend muets la peur d'être dévorés.
Et si c'était par désespoir que les cascades se précipitaient du haut des montagnes ?
Les gargouilles chargées par Notre-Dame de surveiller les hommes.
Asphalte : la ville tire la langue par mépris de la campagne.
La lune blesse la mer d'une plaie vif-argent.
Une marée : pris de vague à l'âme, l'océan va verser ses lames ailleurs.
Mon église n'a qu'une voûte : celle des arbres.
L'aiguille de granit recoud le manteau des neiges au fil de l'arête.