Images
L'océan bave de rage de ne pouvoir abattre la falaise.
Sylvain Tesson
L'avalanche : mauvais penchant de la montagne.
Le vertige est le parapet des suicidaires.
La mousse est un monde.
Ma porte étroite, c'est l'appel du large.
Une ferme fume dans la campagne comme un petit vapeur échoué sur un haut-fond.
La bonté n'existe pas à l'extérieur de l'homme, aucun système politique n'instaurera le règne du Bien et la seule manière de rendre le monde meilleur est de s'attacher à être bon en soi et autour de soi.
Calanques de Cassis : l'eau enfonce son coin turquoise dans l'albâtre du calcaire.
Même les mondes que survolent les dragons sortis des pipes d'opium ne valent pas les chimères produites par la géographie de l'imaginaire.
Quelques hommes au désert, on dit qu'il est peuplé. Une île luxuriante, on l'appelle déserte.
Cette femme est un boulet qui donne une idée du canon qu'elle fut.
Le soir, les vagabonds font griller leurs pensées à la flamme d'un feu.
Dans le jardin d'Eden, la vraie Chute c'est si l'arbre était tombé.
Chaque année dans son lit, l'Amour connaît la débâcle.
L'arbre du jardin d'Eden aurait dû être un pêcher.
Il me semblerait d'utilité publique qu'on engage un corps de lecteurs, payés par la Sécurité sociale, au chevet des convalescents.
Certains n'ont qu'une volée de plomb à offrir à la grâce de la biche.
Grâce à la route, je me suis mis en marche, grâce à la marche, je me maintiens en mouvement et, paradoxalement, c'est quand j'avance, devant moi, que tout s'arrête : le temps et l'obscure inquiétude de ne pas le maîtriser.
Les chiens, comme les hommes : rage aux lèvres, trouille au ventre.
Le reflet est l'echo de l'image, l'écho est l'image du son.
Un nuage blanc brossait les dents de la montagne.
Le vol du vautour : auréole des cadavres.
"Cherche coquillage pour relation durable", écrivait un rocher solitaire.
L'hiver : tailleur qui drape les versants.
On aimerait pouvoir complimenter les suicidés pour leur courage.
Serpent : mécanique ondulatoire.
Les flottes de l'orage mettent en déroute les voiles des cumulus.
Marécage : maison de repos des rivières.
On ne rempote pas une jeune fille en fleur.
Le progrès est la capacité de l'homme à développer son pouvoir de destruction.
Le cigare et la vodka, compagnons idéaux de ces moments de repli. Aux pauvres gens solitaires, il ne reste que cela. Et les ligues hygiénistes voudraient interdire ces bienfaits ! Pour nous faire parvenir à la mort en bonne santé ?
La neige : des copeaux de ciel rabotés par le froid.
J'archive les heures qui passent. Tenir un journal féconde l'existence. Le rendez-vous quotidien devant la page blanche du journal contraint à prêter meilleure attention aux événements de la journée.
Un bois n'a jamais refusé l'asile. Les princes, eux, envoyaient leurs bûcherons pour abattre les bois. Pour administrer un pays, la règle est de le défricher. Dans un royaume en ordre, la forêt est le dernier bastion de liberté à tomber.
Crachin : avarice des nuages britanniques.
Il m'avait raconté sa vie de photographe animalier et détaillé les techniques de l'affût. C'était un art fragile et raffiné consistant à se camoufler dans la nature pour attendre une bête dont rien ne garantissait la venue. On avait de fortes chances de rentrer bredouille. Cette acceptation de l'incertitude me paraissait très noble - par la même antimoderne.
Les experts : spécialiste de l'invérifiable.
Regarder un singe en cage, c'est mettre des barreaux à un miroir.
Pétrole : énergie que le temps met à notre disposition pour nous affranchir de l'espace.
Surpopulation : la Terre n'avait pas prévu son succès.
La pluie récompense les fleurs de l'avoir attendue.
Pourquoi mon camarade ne s'était-il pas spécialisé dans le portrait humain, métier d'avenir. Un milliard et demi de Chinois contre 5000 panthères : ce garçon cherchait la difficulté.
Le grand processus auquel on est soumis, c'est le processus de la désagrégation, de l'oubli et du tri.
J'ai observé un bousier : Sisyphe est un jean-foutre.
La lune, enceinte de lumière, allaîte la nuit.
J'ai vite compris qu'à trop divaguer sur les cartes on risquait la déception. Car le voyageur, une fois l'esprit encombré de mythes, ne partira pas pour découvrir des royaumes inconnus mais pour vérifier si ceux-ci ressemblent à son rêve.
Un jour, il faudra payer le silence de la fleur que l'on cueille.
Noix de coco : frapper fort avant d'entrer.
Le tourisme, c'est l'énergie dépensée en parcourant dix mille kilomètres pour se plaindre que les choses ne fonctionnent pas comme chez soi.
L'orée du bois : première ligne de l'armée des arbres.