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Estre craint par amour et non aimé par crainte...
Théodore Agrippa d'Aubigné
L'air n'est plus que rayons tant il est semé d'anges.
Une rose d'automne est plus qu'une autre exquise.
Tous nos parfaits amours réduits en un amour - Comme nos plus beaux jours réduits en un beau jour.
Comme un nageur venant du profond de son plonge, - Tous sortent de la mort comme l'on sort d'un songe.
Et le soleil voyant le spectacle nouveau - A regret éleva son pâle front des ondes, - Transi de se mirer en nos larmes profondes.
Car l'espoir des vaincus est de n'espérer point.
Nous sommes ennuyés de livres qui enseignent, donnez-nous en pour émouvoir.
Le riche a la vengeance, et le pauvre a la mort.
Cité ivres de sang, et encore altérées, - Qui avez soif de sang, et de sang enivrées, - Vous sentirez de Dieu l'épouvantable main : - Vos terres seront feu, et votre ciel d'airain.
L'homme est en proie à l'homme, un loup à son pareil.
Combien des maux passés douce est la souvenance.
J'aime à voir de beautés la branche déchargée - A fouler le feuillage étendu par l'effort - D'Automne, sans espoir leur couleur orangée - Me donne pour plaisir l'image de la mort.
Retire-toi dans toi, parais moins, et sois plus.
Qui a péché sans fin souffre sans fin aussi.
Mais le vice n'a point pour mère la science, Et la vertu n'est pas fille de l'ignorance.
Satan fut son conseil, l'enfer son espérance.
Ce siècle, autre en ses moeurs, demande un autre style.
Il ne sort des tyrans et de leurs mains impures - Qu'ordures ni que sang.
Quand la vérité met le poignard à la gorge, il faut baiser sa main blanche, quoique tachée de notre sang.
Vos seins sentent la faim et vos fronts la sueur.
Criez après l'enfer : de l'enfer il ne sort - Que l'éternelle soif de l'impossible mort.
J'aime l'hiver qui vient purger mon coeur de vice, - Comme de peste l'air, la terre de serpents.
Les temples du païen, du Turc, de l'idolâtre, Haussent au ciel l'orgueil du marbre et de l'albâtre. Et Dieu seul, au désert pauvrement hébergé, A bâti tout le monde, et n'y est pas logé !
Bienheureux ceux-là qui dépouilleront les bestialités !
Là nous n'avons besoin de parure nouvelle, Car nous sommes vêtus de splendeur éternelle ; Nul de nous ne craint plus ni la soif ni la faim, Nous avons l'eau de grâce et des anges le pain.
Mes sens n'ont plus de sens, l'esprit de moi s'envole, - Le coeur ravi se tait, ma bouche est sans parole : - Tout meurt, l'âme s'enfuit, et reprenant son lieu - Extatique se pâme au giron de son Dieu.
Désirs, parfaits amours, hauts désirs sans absence, - Car les fruits et les fleurs n'y font qu'une naissance.
Notre temps n'est rien plus qu'un ombrage qui passe.
Cet épineux fardeau qu'on nomme vérité.
Courtisans, qui jetez vos dédaigneuses vues - Sur ce chien délaissé, mort de faim par les rues, - Attendez ce loyer de la fidélité.