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Du moment que quelqu'un est né, a vécu, il en restera toujours quelque chose, même si on ne peut dire quoi.
Vladimir Jankélévitch
Ne manquez pas votre unique matinée de printemps.
Notre prière, à un certains degré d'intensité ou d'incandescence, doit s'exaucer elle-même et par sa seule ferveur.
Celui qui a été ne peut plus désormais ne pas avoir été : désormais ce fait mystérieux et profondément obscur d'avoir vécu est son viatique pour l'éternité.
La mort est le seul événement biologique auquel le vivant ne s'adapte jamais.
C'est en plein tintamarre qu'il faut prêter l'oreille au chuchotement imperceptible de Dieu.
Philosopher, c'est se comporter vis-à-vis de l'univers comme si rien n'allait de soi.
Le présent, c'est-à-dire la quotidienneté ambiante, nous assiège de toutes parts et ne cesse de nous convier à l'oubli des choses révolues.
Comment le mensonge ne serait-il pas une tentation quand l'homme faible et puéril est si vite ébloui ?
La mort n'est pas la malchance exceptionnelle de certains hommes, ni le malheur de certains déshérités, elle est une malédiction commune à tous.
La mort est une maladie des bien portants et des malades. Quand on n'est pas malade, on est encore quelqu'un qui doit mourir.
L'amour, c'est un problème résolu à l'infini.
La conscience en réalité se trouve prise entre deux contradictions : ou le bien, sommé d'être bon à tout prix, se niera lui-même, ou le bien, plus soucieux de survivre sera provisoirement infidèle à soi.
On peut me remplacer dans telle ou telle fonction particulière... mais non en tant qu'homme.
L'homme aventureux représente un style de vie, au lieu que l'aventurier est un professionnel des aventures.
Si tout est permis, rien n'est permis.
La passion est la distraction du coeur.
La vie affective, à condition d'être sincère et pure de tout apocryphe, est donc une lenteur et un attardement.
La mort, vue de près, ne nous apprend littéralement rien sur elle-même, et elle n, est pas mieux connue de près que de loin.
Où allons-nous si les gens commencent à croire vraiment ce qu'on leur dit - et qui est fait pour n'être pas cru ! Qui sait si, au lieu du mensonge, il ne faudra pas finir par leur dire un jour la vérité ?
L'esprit tantôt nie aveuglément l'infini actuel au nom d'un finitisme sans conviction, tantôt parie dans la nuit pour un absolu.
Le dolorisme a beau se délecter dans les tortures, il reste dérisoirement prisonnier de l'hédonisme.
L'homme détaché écrit le testament du bonheur le jour même de sa naissance.
Si la mort n'est pensable ni avant, ni pendant, ni après, quand pourrons-nous la penser ?
Il n'y a que le vrai qui ne soit pas vraisemblable, il n'y a que le romanesque artificiel qui soit en tous points convaincant.
Le mourant est dans la situation d'un homme qui sort de chez soi sans la clé et ne peut plus rentrer parce que la porte fermée ne s'ouvre que du dedans : la sortie seule est permise... à vos risques et périls !
Dieu n'entre pas dans les détails ! Les détails, il les abandonne à la créature, pour que la demi-liberté de l'homme trouve à s'employer.
La mort n'est pas un grand voyage, elle n'est pas semblable au sommeil. Elle n'est pas une maladie. C'est la maladie des maladies.
Il faut bien donner un nom à ce qui n'a pas de nom, à ce qui est impalpable... Tout compte fait, c'est là le métier des philosophes et de la philosophie.
J'aime que la musique ne soit pas sourde à la chanson du vent dans la plaine, ni insensible aux parfums de la nuit.
On ne peut pas dire pourquoi. La raison de l'amour, c'est l'amour. La raison de l'amour, c'est qu'on aime.
Il faut passionner les masses pour les organiser.
Hélas ! pourquoi ne peut-on à la fois être raisonnable et ardent ?
La philosophie est toute entière préliminaire. A moins que ce ne soient les préliminaires qui soient déjà philosophie.
Dieu est une sorte de rien abyssal, et pourtant la vérité ne s'abîme pas dans cet abîme, ni ne s'écroule dans ce précipice.
Chaque repas que l'on fait est un repas de moins à faire.
Le jour même où le sentiment se déclare, nous prenons nos dispositions pour n'être pas surpris par son déclin.
On peut déclamer sa maladie ou réciter la mort des autres, mais sa mort propre, on la meurt toujours avec naturel.
L'événement de la mort n'est une "éventualité" que dans sa date et ses circonstances. Biologiquement, statistiquement, qu'y a-t-il de plus prévu que le fait de la mort ?
La mort révèle l'amour, c'est l'inconsolable qui pleure l'irremplacable.
L'urgent, c'est le pressant avenir immédiat, le futur en train de se faire au présent.
Nous vivons du poison dont on meurt.
Le jaloux en veut à celui qu'il considère comme son ennemi simplement parce qu'il est riche, beau ou fort - mais le méchant déteste le haï bien qu'il soit pauvre, laid et faible.
La violence s'oppose si peu à la faiblesse que la faiblesse n'a souvent pas d'autre symptôme que la violence ; faible et brutale, et brutale parce que faible précisément.
Un secret qu'on est vraiment seul à détenir, un tel secret rendrait malades les plus robustes, et on peut même se demander s'il existe une conscience assez intrépide pour supporter ce tête-à-tête, sans en mourir.
... il ne faut pas vouloir être trop fin si l'on veut éviter les bévues, ou plutôt il faut l'être assez pour ne l'être pas quand on doit avant tout être simple.
Dieu n'est-il pas le poète suprême en tant qu'il improvise les mondes ?
La tolérance est un moment provisoire. Elle permet à ceux qui ne s'aiment pas de se supporter mutuellement, en attendant de pouvoir s'aimer.
La gaffe est l'administration massive, intempestive, et inopportune de ces vérités qu'une posologie civilisée dose en général goutte par goutte.
Il faut penser tout ce qu'il y a de pensable dans l'impensable.